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06/09/2015

Recyclage

Je regarde cette grande boite de carton, remplie de jouets d'enfants. Et ce petit lit, et cette petite commode. Les jouets d'une petite fille, Anoulaida. Anoulaida est morte de la leucémie. Ses parents ont fini par parvenir à vider la chambre. Mais ils n'ont pas été capables de jetter, n'ont pas été capables de vendre, de donner... Qui voudrait mettre son enfant dans le lit d'une morte?

Les superstitions persistent, malgré la disparition de dieux et des démons, dans le quotidien contemporain.

Que dois-je faire? Mon cerveau s'embrouille dans tant de méandres... Cette fillette est morte. Elle ne laisse rien dans ce lit. Les souvenirs ne sont que dans la tête des gens. Ils ne sont pas gravés dans le bois des meubles ou dans la pierre des murs, n'est-ce pas? Il faudrait être sot pour le croire! Et la leucémie, ce n'est pas contagieux, n'est-ce pas?

Pourtant, qui mettrait son enfant dans ce lit. Et que dois-je faire? Aurait-on dû enterrer cette fillette avec ses jouets et ses meubles alors? Pas par superstition. Parce que c'est peut-être la chose la plus logique à faire, si personne n'en veut plus sur cette terre!

Je suis devant cette boite. Elle est vide en réalité. Ce ne sont que mes pensées qui la remplissent. Mais je suis bien sur le lit d'une morte.

Je relis mon dernier post. Je le trouve concis. Je le comprends bien. J'ai l'impression que je pourrai l'écrire à nouveau aujourd'hui. Et il prendrait une nouvelle dimension.

Je me suis trompé cependant. Le psychiatre m'aide. Il a confirmé l'autisme. M'a dit que pour cela il ne pouvait rien faire. Il a fait quelque chose quand même cependant. Il m'a donné des voies pour tenir debout.

Il a diagnostiqué mon déficit de l'attention. En a précisé les contours. Et on essaie une médication.

J'ai pour la première fois passé une journée dans la peau d'une personne sans déficit de l'attention. C'est très impressionnant. Impressionant de voir comment on peut fonctionner toute une journée sans trop perdre le fil de ce que l'on fait, du matin jusqu'au soir. Je comprends mieux maintenant...

Mais après, je me débats avec des effets secondaires indésirables. On essaie d'ajuster. Cela aurait été trop facile. Une petite pilule et "hop".

J'espère quand même pouvoir parvenir à devenir quelque peu fonctionnel quelques mois de plus chaque année, peut-être. Cela changerait probablement ma vie!

Et je vois ces messages se multiplier, sur Facebook ou ailleurs. Et je vois cette grosse torche poster sur son mur sa petite contribution depuis son Iphone. Qu'en a-t-elle à foutre de la mort d'un enfant. Enfant qui a cousu ses vêtements H&M made in Bengladesh ou assemblé sa puenteur made in Appleland.

Je vomis ces emballements surannés par des siècles d'indifférence, par une vie à enfouir sa tête dans le sable, sans même tenter de corriger ce qui est à portée. Une vie à détourner sa tête de l'évidence des chemins de la responsabilité. Pour protéger ses petits acquis, pour continuer de se promener en tentant de garder bonne conscience. Une vie à se regarder le nombril, mais en versant une petite larme pour faire croire qu'elle partage. Et surtout, il faut bien l'exposer, cette petite larme, pour que tout le monde voit qu'elle souffre vraiment...