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10/05/2016

La route cahotique...

Je quitte l'aéroport d'Edmonton alors que des files d'autobus scolaires se synchronisent avec une rotation incessante d'avions qui évacuent Fort Mc Murray. Plus de 100 00 personnes seront déplacées en quelques jours, par air ou par voie terrestre. Une grand partie seront dirigés ici, à Edmonton, ou à Calgary, mais aussi dans les communautés encore en sécurité aux alentours de Fort Mac.

Et j'entends ces voix qui disent " Ah, voilà... ces coupables qui paient!"

Oui, parce que aujourd'hui, il faut désigner des coupable pour tout. Des coupables de tout, pour éviter de voir notre propre conscience émerger des brumes de notre lâcheté et nous exploser le cerveau, nous réduire à notre insignifiance, notre vacuité, au néant que nous sommes.

Et bien sûr, on ne va pas dire que ces travailleurs du pétrole sont les coupables. On va dire que ce sont les multinationales pétrolières. C'est bien ça, des multinationales. Elles ont un nom mais sont anonymes. Ça ne fait de mal à personne de taper dessus. Ça nous défoule, ça nous soulage, ça nous déculpabilise.

Mais non, ces multinationales ne sont pas les coupables. Elles ne sont que le vecteur que nous autorisons à porter notre inaction, notre lâcheté, notre non volonté.

Ah... vous mettez vos déchêts recyclables dans votre bac. Mais l'ineptie de ces camions brûlant des tonnes de pétrole pour les collecter, qu'en faîtes-vous? Et ce pétrole, d'où vient-il? Trouvez-moi du pétrole propre svp!

Ah, oui, mais que faire alors? Par où commencer? On n'y peut rien pas vrai!

C'est tellement plus pratique de blâmer des multinationales que nous cautionons en achetant leur pétrole en barquettes de supermarché. Ah... ces petites barquettes de viande dont le tiers finira aux poubelles, bien enveloppé de film plastique!

Tellement pratique pas vrai?

Quelques minutes en enfer...

 

28/10/2015

Une roue qui tourne, comme un moulin à vent...

Les applaudissements sont nourris, mais on sent le public plus préoccupé par le besoin de quitter les lieux rapidement pour ne pas être "pris" dans les embouteillages de fin de spectacle que par celui de rendre un juste hommage aux artistes. C'est devenu la norme... ces gens qui se pécipitent, et les autres qui suivent, par crainte de... de quoi d'ailleurs? Je reste assis, bloquant l'accès à l'allée. Je suis assis en bout de rangée. Je savoure le moment. J'observe les gens. Je suis assis au milieu de nantis, à l'Opéra d'Edmonton, le "Jubilee Auditorium", une salle magnifique, à l'acoustique impeccable!

Opera,Edmonton,Alberta,Jubilee Auditorium

http://www.jubileeauditorium.com/

Et mon esprit remonte de quelque mois dans le passé. Quatre mois environ. Que ne sais-je m'occuper de moi-même comme je m'occupe des autres?

Beaucoup d'émotions, de flux incontrolables, mais j'ai repris la capacité d'analyser sereinement.

 

06/09/2015

Recyclage

Je regarde cette grande boite de carton, remplie de jouets d'enfants. Et ce petit lit, et cette petite commode. Les jouets d'une petite fille, Anoulaida. Anoulaida est morte de la leucémie. Ses parents ont fini par parvenir à vider la chambre. Mais ils n'ont pas été capables de jetter, n'ont pas été capables de vendre, de donner... Qui voudrait mettre son enfant dans le lit d'une morte?

Les superstitions persistent, malgré la disparition de dieux et des démons, dans le quotidien contemporain.

Que dois-je faire? Mon cerveau s'embrouille dans tant de méandres... Cette fillette est morte. Elle ne laisse rien dans ce lit. Les souvenirs ne sont que dans la tête des gens. Ils ne sont pas gravés dans le bois des meubles ou dans la pierre des murs, n'est-ce pas? Il faudrait être sot pour le croire! Et la leucémie, ce n'est pas contagieux, n'est-ce pas?

Pourtant, qui mettrait son enfant dans ce lit. Et que dois-je faire? Aurait-on dû enterrer cette fillette avec ses jouets et ses meubles alors? Pas par superstition. Parce que c'est peut-être la chose la plus logique à faire, si personne n'en veut plus sur cette terre!

Je suis devant cette boite. Elle est vide en réalité. Ce ne sont que mes pensées qui la remplissent. Mais je suis bien sur le lit d'une morte.

Je relis mon dernier post. Je le trouve concis. Je le comprends bien. J'ai l'impression que je pourrai l'écrire à nouveau aujourd'hui. Et il prendrait une nouvelle dimension.

Je me suis trompé cependant. Le psychiatre m'aide. Il a confirmé l'autisme. M'a dit que pour cela il ne pouvait rien faire. Il a fait quelque chose quand même cependant. Il m'a donné des voies pour tenir debout.

Il a diagnostiqué mon déficit de l'attention. En a précisé les contours. Et on essaie une médication.

J'ai pour la première fois passé une journée dans la peau d'une personne sans déficit de l'attention. C'est très impressionnant. Impressionant de voir comment on peut fonctionner toute une journée sans trop perdre le fil de ce que l'on fait, du matin jusqu'au soir. Je comprends mieux maintenant...

Mais après, je me débats avec des effets secondaires indésirables. On essaie d'ajuster. Cela aurait été trop facile. Une petite pilule et "hop".

J'espère quand même pouvoir parvenir à devenir quelque peu fonctionnel quelques mois de plus chaque année, peut-être. Cela changerait probablement ma vie!

Et je vois ces messages se multiplier, sur Facebook ou ailleurs. Et je vois cette grosse torche poster sur son mur sa petite contribution depuis son Iphone. Qu'en a-t-elle à foutre de la mort d'un enfant. Enfant qui a cousu ses vêtements H&M made in Bengladesh ou assemblé sa puenteur made in Appleland.

Je vomis ces emballements surannés par des siècles d'indifférence, par une vie à enfouir sa tête dans le sable, sans même tenter de corriger ce qui est à portée. Une vie à détourner sa tête de l'évidence des chemins de la responsabilité. Pour protéger ses petits acquis, pour continuer de se promener en tentant de garder bonne conscience. Une vie à se regarder le nombril, mais en versant une petite larme pour faire croire qu'elle partage. Et surtout, il faut bien l'exposer, cette petite larme, pour que tout le monde voit qu'elle souffre vraiment...

 

24/05/2014

Le panier de crabes

Quand je parle de mon goût pour le poisson et les fruits de mer, cela inclut bien évidement les crabes! Ici, est passée la saison du crabe des neiges (ou crabe de l'Alaska), une sorte d'araignée de mer, pour les français, bon marché ici au moment de la saison de pêche. Et puis il y a le homard. La saison va commencer. Ou a commencé d'ailleurs peut-être. On commence à en voir dans les viviers des magasins et des restaurants, même si ils doivent traverser le Canada (plus de 5000km, puisqu'ils sont pêchés dans l'Est du pays, de l'Est du Québec au New-Brunswick, à la Nouvelle Écosse et les Îles de la Madeleine). J'ai hâte de voir à quels prix ils seront vendus ici, et si je pourrai m'en faire cuire au moins une fois dans cette courte saison.

Ceci dit, c'est du terme utilisé par certains pour désigner le cancer dont je voulais parler aujourd'hui.

Je déteste cet usage. Je déteste cette façon qu'on les humains de masquer un mal par des artifices, de refuser d'affronter les difficultés dans leur nature crue, dans leur réalité, même brutale. Cela contribue je crois à réduire les possibilités de passer au travers au mieux.

Il est des gens avec le cancer dont l'entourage cherche à minimiser le risque de fatalité. Peut-être pour tenter de conjurer le sort, peut-être pour tenter de remonter le moral de la personne. Les psychologues sont unanimes sur le sujet. Cela n'aide pas la personne concernée (qu'elle soit atteinte d'une maladie, victime d'un drame ou passant au travers de difficultés).

J'ai passé à une époque de ma vie huit mois condamné à mort par les médecins. J'ai eu toutes sortes de réactions dans mon entourage; les "amis" qui disparaissent. Ceux-là, je les ai rayé de ma vie. Je n'ai gardé dans mon coeur que les belles choses qui en sont sorti. Dont une de mes plus proches amies, qui va probablement lire ce post à un moment où à un autre, et qui a été à cette époque d'un incroyable soutient. Alors, quand tu liras ceci, je t'embrasse au passage!

Dire à une personne qui vient de divorcer "mais non, regarde, je suis passé par là... tu verras, tu vas l'oublier et tu seras heureuse avec quelqu'un d'autre" ne vas pas l'aider! Dire "tu sais, même si je suis passé par là, je ne peux même pas imaginer ce que tu vis en ce moment. Mais tout ce que je sais, c'est que c'est le pire drame de ta vie actuellement. Qu'est-ce que je peux faire pour toi, pour t'aider?" sera beaucoup plus approprié. La personne déclinera probablement l'offre d'aide. Et les vrais amis chercheront la petite chose qui fera plaisir, qui fera vraiment du bien. Ne serait-ce qu'un petit mot disant l'appréciation que l'on a de cette personne...

Dire à une personne atteinte d'un cancer "Ah, ce maudit crabe... mais tu sais, pleins de gens s'en sortent. Il faut se battre, il faut y croire..." n'aura pas d'effet positif. Oh, peut-être cela nous soulagera-t-il.Peut-être que cela soulagera notre conscience également. Mais le malade, lui en sortira affecté D'ailleurs, on voit peu de cancéreux remplacer systématiquement le mot cancer par celui de crabe.

J'ai probablement une vision déformée de la chose, mais j'ai tendance à visualiser le pire dans ces situations. Que ce soit une situation qui m'affecte directement ou qu'elle affecte un proche. Quand je pars en mer, je visualise le fait que je ne reviendrai jamais au port. Cela me permet d'affronter les pires dangers avec sérénité. N'ais-je pas accepté en larguant les amarres la possibilité de ne jamais revenir. Alors que peut-il m'arriver d'autre, de pire...

Je suis toujours revenu au port! Jusqu'à présent...

Mais c'est vrai que quand l'on vient au monde, on n'a pas signé. Nos parents l'on fait pour nous... de facto. Et on est contraint par l'engagement qu'ils ont pris pour nous, pour le meilleur ET pour le pire!

J'ai perdu beaucoup de proches aux mains de maladies, de circonstances dramatiques. À chaque fois, j'étais convaincu que tout finirai bien. Alors, après avoir trop souffert, j'ai pris l'option d'accepter le pire dénouement. Et parfois, j'ai la chance que tout se finisse bien. Enfin, disons plutôt que parfois, je partage avec un proche un heureux dénouement.

Mais ce que je garde dans mon coeur, quel que soit le dénouement final, ce sont les nombreux "merci d'avoir été là...", les nombreux "merci, ça m'a fait du bien...", ou parfois juste les silence, et des larmes.

Je pense à toi Pierre. À ta bien-aimée qui m'a dit de tenir bon parce que je lui permettait de tenir elle aussi. Je revois ce dernier souffle de vie s'échappant de tes lèvre comme si c'était hier... Il y a si longtemps!

Où en étais-je... que de digressions aujourd'hui... Ah oui, le panier de crabes... les malades atteints du cancer...ceux qui ne s'en sortiront pas mais que l'on peut soulager par des mots appropriés...

Ma mère à un cancer.

 

17/03/2013

à corps perdu!

Chaque jour, chaque instant... j'ai le goût d'écrire. J'écris... J'ai besoin de structure pour fonctionner. Mon autisme m'enferme plus que jamais dans son étreinte parfois étouffante au point de vouloir juste cesser de respirer, lui laisser la priorité sur mon souffle qu'il détourne pour assouvir son besoin de me priver d'oxygène.

Les neurotypiques ne peuvent comprendre...

Je suis partagé entre le besoin de vous exprimer ce que je vis, parce que j'ai développé avec plusieurs d'entre vous une relation plus que réelle, parce que je voudrais pouvoir vous dire un jour "ça y est, je vais à peu près bien" et l'envie de le faire autrement, parce que ce blog est loin de remplir, de contenir tout ce que j'ai en moi. Parce que je voudrais vous inclure, vous faire passer du côté de ces gens que je cotoie face à face... Parce que je voudrais vous montrer tout, partager ce qui rend les gens heureux autour de moi quand je finis par transcender les blocages, quand je rends l'improbable possible, le rêve d'un instant magique...

J'ai envie de hurler, de déblatérer sans arrêt pendant des jours, jusqu'à ce que se tarisse, ou pour le moins s'assagisse le flot de ce que je voudrais exprimer et que je ne puis...

Peut-être le pourrais-je, un jour...

Ce court séjour à New-York m'a donné le "jus" dont j'avais besoin. Une personne que je ne connaissais pas du tout m'a apprécié pour ce moment partagé. Je me suis senti pour la première fois depuis des mois, des années, un être humain à part entière.

Puis je me suis enfermé dans mon monde, le monde de la mer, pendant des semaines, menant un combat à la vie à la mort. Vous ne pouvez pas imaginer ce que cela fait de voir la grande faucheuse dressée devant soi, et se dire "il faut que je l'affronte à bras le corps, il faut que je colle mon corps contre ses os, contre son suaire répugnant, en évitant sa lame acérée, ses coups vicieux..."

J'ai mal partout dans mon corps, dans mon âme... je dois me replier à nouveau en moi-même pour trouver les ressources pour avancer encore d'un pas, un petit pas, en avant.

Mais qui pourra un jour me prendre la main? Qui pourra me sortir de cette ornière, de ce toît sans lumière, de ce ciel sans étoile, de ce jour sans soleil...

26/11/2012

Mort dans l'âme, vie par la lame...

Je suis le seul "survivant" de la battue aux sdf. Pour combien de temps encore? "La valise bleue" s'est fait sortir le lendemain. Je continue mes contorsions, et parviens à passer au travers des mailles. J'ose à peine vous le dire, de crainte que... On devient un peu supersticieux malgré soi, dans la crainte!

C'est une guerre psychologique de chaque instant.

Premier enseignement; ne pas faire de soi une cible.

Deuxième enseignement; afficher le plus possible que l'on vendra cher notre peau. Donc essayer de montrer que l'on représente un plus grand danger si on est agressé que si on est ignoré.

Un gardien de sécurité, ce n'est pas très bien payé, ce n'est pas un métier de "vocation". J'ai plusieurs amis qui ont pratiqué ce métier. J'ai donc une bonne idée de ce qui anime ceux que je croise dans mes battures...

Si ils peuvent s'épargner du trouble, ils le feront. Je dois donc me couler dans la peau de quelqu'un qu'ils peuvent ne pas voir, sans risquer la réprimande. Parce que évidement, ils ne veulent pas perdre leur job, ils ne veulent pas prendre de risque.

Alors, je multiplie les ruses. Quand, de temps à autre, j'achète quelque chose à manger en ces lieux, je prends plutôt deux ou trois choses dans deux ou trois places différentes, à quelques temps d'intervalle, en me surexposant lors de l'achat. J'attends le passage d'un gardien de sécurité et m'assure qu'il me voit. C'est le seul moment où je prends l'antidote de la potion d'invisibilité. De cette manière, il pourra dire que je suis un client comme les autres, même surement un bon client car je suis souvent là, toujours avec une consomation.

Parce que oui, je triche là aussi. Je garde un gobelet étampé aux couleurs d'un des marchands, ramasse un plateau discrètement, y mets le gobelet et un sac de papier (vide) dans lequel ils emballent les repas.

Et puis j'observe, j'écoute... La plupart des employés sont préoccupés par les soucis de leur propre vie. Ils ne vont pas s'en rajouter inutilement. Sauf ce petit con, assigné au nettoyage dans un fast food, que j'ai entendu maugréer contre les consommateurs qui collent des heures dans le commerce pour profiter de l'accès internet. J'ai failli lui dire que tout le quartier était sous un hot-spot gratuit et puissant, et qu'il suffit de s'assoire n'importe où pour en profiter. J'ai failli lui dire aussi que chacun de ces consommateurs paient une part de son salaire, et que le restaurant est rarement plein. J'ai préféré rester invisible. Ce genre de personne est dangereux, parce que bête et méchant. Je ne peux pas me permettre le risque.

17/11/2012

Le début de la faim...

Je suis assis à un grand carrefour souterrain du centre-ville de Montréal. Cette fameuse villle sous la ville, qui permet l'hiver de déambuler pendant des heures, d'un espace à l'autre, sur des kilomètres du downtown, sans jamais sortir dehors.

Et je vois ce gars arriver, doucement, prendre un plateau sur le meuble sur lequel les gens les déposent après avoir fini leur repas. Il pousse le couvercle de la poubelle en sort une assiette en carton et un gros morceau de pizza que quelqu'un a jetté. Il s'assoit à une table et commence à manger... j'ai un haut-le-coeur. Je n'arrive plus à même penser manger pendant un long moment.

Je me fais quêter une pièce par un grand gars barbu un peu agressif. Je refuse. Il a un geste rageur. Serait-ce l'approche de l'hiver qui rend le monde ainsi?

Un peu plus tard, dans un recoin de couloir, à deux pas d'une université, trois pas du siège social de grandes banques, là où peu de gens passent à cette heure, mais quand même un axe fréquenté, je revois ce gars, assis pas loin de deux autres, en train de se préparer leur seringue...

C'est la première fois que je vois ça dans un tel lieu. Je suis perplexe, choqué de voir que cette misère s'étend maintenant à la vue de tous, au beau milieu de l'activité urbaine.

Quand je repasse le lendemain matin, ils sont toujours là, dans un état comateux, immobiles, figés dans des positions improbables.

19/10/2012

Flash back

Attablé dans un petit restaurant qui a la particularité de servir un steak-frite-salade pour moins de 15$ (10€) taxes incluses, je repense à ces derniers mois. C'est la deuxième fois que je viens ici. C'est mon deuxième steak en quatre mois. Il faut savoir que je suis un "beef-eater". Pas gargantuesque, mais cela fait partie de ma diète indispensable. Je n'ai mangé de la viande que 5 ou 6 fois durant cette période...

Le verdict est tombé, je suis anémié. Cette fatigue, cette incapacité d'agir normalement s'est retrouvée inscrite dans mon sang.

Alors j'entends les discours... "quand on veut..."

Je lis ces petits commentaires incendiaires du style "je donne une pièce pour m'apercevoir ensuite que le sdf a un smartphone alors que moi-même ne peux pas m'en acheter un..."

Je me projette; je ne mendie jamais, mais imaginons... je n'avais pas mangé normalement depuis des semaines, perdu 6 kilos...

Quand j'ai reçu un montant d'argent dû depuis longtemps par un client, je suis allé dans ce petit restau...je n'avais pas mangé un vrai repas depuis des semaines, et j'étais déjà manifestement anémié.

mais si j'avais mendié, et qu'une personne m'ait donné de quoi me payer ce restau... Assis devant mon steak... imaginons toujours... je vois une personne qui m'a donné une pièce un peu plus tôt me dévisager en se disant "je lui donne une pièce et regardez, il se paie un restau alors que moi..."

Alors, on donne, ou on ne donne pas! Mais de grâce, cessez de juger...

J'ai passé des mois dans la rue ces dernières années. Je n'ai pas vu UN SEUL sdf qui n'ai pas besoin de suivi psychologique ou psychiatrique.

"Oui, mais il y en a pour qui c'est un mode de vie..." ou "tu leur proposes une place en refuge, ils refusent..."

Avez-vous déjà été dans un refuge pour sans-abris?

J'y ai passé une fois quelques moments... un centre bien tenu, propre, mais la clientèle était lourde. Toxicos, psychotiques qu'on a sorti des hôpitaux psychiatriques dans ce mouvement d'allègement des centres et des frais reliés à la santé mentale... Quatre par chambre... cela parait raisonnable, mais quand les voisins parlent tout seuls, crient... Et je ne parle pas du vol, de la violence sous-jascente en permanence (si un résident en agresse un autre, ça ne fera pas les gros titres comme quand un dément en liberté tue un "honnête citoyen" lambda dans la rue. On lira peut-être deux lignes anonymes; "deux clochards s'entre-tuent dans un refuge!", si il y a mort d'homme seulement. La première fois où on les considèrera à nouveau comme étant humains... peut-être pour un jour justifier de passer un loi autorisant l'administration à prélever leurs organes sans leur autorisation... (croyez-le ou non, j'ai déjà entendu cela!)

Moins d'une heure dans ce centre et je serai monté sur le toit pour faire cesser ce calvaire d'un plongeon libérateur! Alors je suis retourné dans la rue, par moins quinze degrés, sans hésiter!

Alors si on me dit; "pourquoi tu ne vas pas dans une refuge", je dirais "je préfère encore la rue". Ce n'est pas un choix. Pour moi, la rue, c'est le dernier rempart avant la mort. Un refuge, c'est renoncer à être considéré comme un être humain. Un refuge, pour moi, c'est la mort!

Derrière chaque être humain dans la rue, il y a une histoire, souvent insoutenable à entendre. Je peux vous le dire, j'ai écouté, beaucoup écouté.

Une seule personne connait ma vie dans certains de ses détails les plus sombres. Cette personne avait été un enfant battu que son père lançait contre les murs (au sens propre!), tabassait jour après jour depuis aussi loin que remontait sa mémoire, au point où elle était consciente par moment que son cerveau était irrémédiablement endommagé par ces années de maltraitance. Cette personne qui a été violée, dont des vautours ont abusés, après avoir écouté mon histoire, a trouvé incroyable que j'ai pu survivre à tout cela, trouvant que ma vie avait été pire que la sienne. Et pourtant, moi, je trouvais sa survie plus incroyable encore... Rendu dans cette surenchère de l'horreur, que pensez-vous...? Deux borgnes au royaume des aveugles, est-ce que cela fait un voyant?

Alors, si vous voyez un sdf avec un smartphone, dîtes-vous que c'est souvent son dernier moyen de contact avec le monde, son dernier petit espoir. Dîtes-vous que quelqu'un lui a peut-être donné lorsqu'il s'en est racheté un neuf, comme je l'ai déjà vu... ou, comme moi, qui en ai sauvé un de sa misère. Oui, je suis un sdf de luxe, avec un ordinateur portable, un appareil photo, un lecteur MP3 et un vieux smartphone qui me permet d'être en contact plusieurs fois par jour avec le monde, pour tenter de ne pas perdre un contrat, surveiller la météo, appuyé sur le mur exterieur d'un café avec un hotspot, ou dans le hall d'une bibliothèque, pour pouvoir appeller via internet un client, ou un intervenant dans l'espoir d'un rendez-vous médical...

Et puis, donnez... ou ne donnez pas, mais de grâce, après avoir donné, ne jugez pas ce que la personne va faire de votre don, parce que nous sommes des êtres humains qui essayons, chacun à sa manière, chacun de son mieux, de sauver notre peau.

02/07/2012

Usurpations...

Dans un monde où l'imagination fait défaut, où la peur de ne pas suivre le flot  de l'humanité corrompue est souvent plus puissante que tout, on se retrouve parfois confronté à de drôles de choses.

Et du fond de mes galères, je ne fais pas exception. Je n'aurai jamais cru que des gens puissent chercher à vampiriser mon minable blog, mes propos intimes, les gens qui sont venu ici parce qu'ils ont aimé ce qu'ils ont vu.

Vous le savez, je suis un peu geek. Donc je surveille de temps à autre ce qui se passe autour de mon image virtuelle.

Quelle ne fut pas ma stupéfaction un jour de voir des propos extraits de mon blog et placés totalement hors contexte (du vrai travail de pro-liticien!) par un homme politique français peu scrupuleux qui cherchait à effrayer la population avec l'hypothétique risque de voir la France devenir comme "l'Amérique", où les gens se retrouvent comme moi, à la rue, à cause des vilains méchants de la race du parti adverse.

Je ne m'abaisserai pas à relever. (Il est des choses qui ne peuvent l'être!).

Juste pour vous, parce que nous partageons quelque chose de réel.

Le Québec, et le Canada dans son ensemble, jouit d'une situation privilégiée, et la couverture sociale et médicale y est comparable à celle de la France. Mon cas est atypique, puisque je cumule des problématiques hors norme, et pour lesquelles heureusement, le Québec est 20 ans en avance sur la France. Je ne sais pas comment je serai passé au travers de tout cela si j'avais été en France.

En fouillant un peu, je me suis aperçu qu'un gars avait usurpé mon pseudo de ce blog (après être passé comme visiteur ici) et l'a transféré sur Facebook pour aller vivre ensuite un temps à Montréal. Je ne sais dans quelle mesure des gens ont pu croire qu'il s'agissait de moi... bref, le sdfdeluxe de Facebook n'est pas moi...je ne sais pas dans quelle mesure je vais réagir. Je pourrais facilement lui pourrir la vie à la manière d'un geek, ou faire valoir mes droits enregistrés... je vais voir!

Je vais probablement simplement court-circuiter l'anonymat de ce blog. J'ai aimé partager avec vous, je n'ai rien à cacher. Vous aurez l'exclusivité d'avoir vécu des moments de ma vie en direct!

Les relations que j'ai développé ici sont de vraies relations humaines. Je n'ai pas toujours su exprimer à quel point ces relations nouées avec certains visiteurs me sont précieuses, élevées au niveau de véritables et profondes amitiés...même si je n'ai rencontré que peu d'entre eux.

Demain, je n'aurai plus de logement. Après une journée supplémentaire de répit, je retourne vivre dans la rue. Je ne sais pas quoi faire d'autre. J'ai planifié certaines choses, d'autres sont encore incertaines...  j'ai encore la "drive" pour expérimenter, tenter, provoquer...

Encore une fois sans filet, encore une fois sans trucage... j'espère que nous pourrons encore le partager ensemble!