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09/07/2012

Le surdoué!

À l'age de trois ou quatre ans, comme tous les enfants, on m'a appris à compter. Je m'en souviens très bien. C'était ma grande soeur. Elle m'a appris une fois. J'ai répété quelques fois en m'embrouillant un peu avec les soixante, soixante-dix, mais ensuite, j'ai projeté les centaines, les milliers... C'était sans intérêt. Ça recommence tout le temps, rien de bien compliqué. J'ai appris en une journée. Alors j'étais impatient d'aller à l'école. Ma soeur me disait que ce serait facile parce que je savais déjà tout. Mais je ne la croyais pas. J'étais sûr qu'on allait m'apprendre le "pourquoi", le comment, le but.

Mais j'avais déjà saisi le concept de l'infini, le concept qui lui est lié, celui de l'éternité. Et également le pouvoir du "1". Qui que ce soit me dise qu'il avait trouvé l'extrémité de l'infini, je pourrais lui dire "non, parce que +1". Et j'ai élargi cela au concept de l'humain, qui ne peut se figer, même dans l'infini...

Alors, quand l'instituteur, devant mon air de ne pas comprendre, m'a demandé si j'avais un problème, je lui ai demandé "à quoi ça sert, de compter?". Il m'a répondu: " et bien, par exemple, pour acheter des pommes, il faut savoir combien tu en veux, et le prix de chacune...". Et de me dire ensuite "une pomme, plus une pomme...". J'allais répondre "oui, mais les pommes elles ne sont pas toutes pareilles... J'ai laissé tomber. Il fallait d'abord que j'évalue si il était réellement stupide, ou si simplement il ne voulait pas me dire le secret!

J'ai le syndrome d'Asperger, fort probablement. Alors j'ai une relation un peu spéciale avec les maths.

Pour moi, vouloir réduire des pommes en deux dimensions, couchées sur le papier, était déjà une absurdité. Je voyais déjà le volume, la masse, la densité, dans l'espace, en trois, quatre, cinq dimensions. La quatrième dimension, pour moi, c'est les variables. La cinquième, les accidents.

Ensuite, leur représentation était quelque peu limite. Même si on s'applique, les chiffres ne sont pas identiques... alors, je dis souvent; "un plus un fait "relativement deux", pour être plus précis (ou plutôt moins, parce qu'il faut admettre et mettre en relief l'imperfection et les limites du concept).

J'avais du mal à saisir le parcours laborieux que les "scientifiques" ont trouvé pour expliquer les choses.

Ramener tout en deux dimensions, puis ensuite, extrapoler ces deux dimensions pour en refaire une troisième, puis se frapper à la quatrième et buter sur la cinquième. Quand tu vas te casser la gueule, mieux vaut le savoir d'avance, non?

Notre cerveau est beaucoup plus puissant que ces deux dimensions. Un ordinateur n'est qu'une stupide machine qui ne sait compter que jusqu'à 1. Si vous saviez la gymnastique qu'on leur demande pour arriver à faire ce que vous voyez sur votre écran...!!!

J'ai passé l'essentiel de ma vie à court-circuiter les maths pour aller droit au but. Quand j'affronte un problème, je passe quatre fois plus de temps que la moyenne à assimiler les paramètres, tous les paramètres, dans toutes les dimensions utiles. Puis, je coupe droit au but. J'élimine ainsi graduellement toutes les inutilités, les absurdité, les quasi-impossibilités. Quand le problème est complexe, je fouille les absurdités. Quand il est insoluble, je fouille les impossibilités. En général, je trouve la solution rapidement, puis je la valide par les maths. Faire du rétro-ingeneering, ça va plus vite! En bout de ligne, même si le départ semble laborieux, le résultat arrive très souvent beaucoup plus rapidement.

Et pourtant, à cause de mon autisme, je suis incapable de faire un certain nombre de choses simples. Incapable de définir un ordre de priorité, un ordre des choses à accomplir. Pour moi, parfois, la chose la plus importante est de ranger. Bien ranger. Quel que soit le temps que cela prend, quelles que soient les conséquences que cela peut avoir, je vais prendre des heures, des jours, à classer, trier, plier, rouler, aligner mille objets que je dois pouvoir ensuite retrouver instantanément dans ma mémoire. Bon, d'accord, ça n'arrive pas si souvent que ça. En fait, il y a des chercheurs qui ont défini ma façon de "ranger" et l'on qualifié de "méthode du fouillis archéologique". (oui, ils ont des salaires énormes et des budgets pour ça!). Mon bureau de travail à toujours l'air d'un champs de fouilles. Des quantités invraissemblables d'informations, en piles apparament en désordre. En réalité, elles sont toutes liées les unes aux autres par le facteur temps. Facile donc d'identifier n'importe quelle pièce. Les gens hallucinent quand ils me voient retrouver presque n'importe quoi en quelque secondes, allant droit au but, après quelques sondes d'évaluation chronologiques. Je peux avoir des milliers de documents, s'étalant sur une période de plusieurs années, cela ne change rien. Mais de temps en temps, il y a l'accident. L'accident, cela peut être mon déficit de l'attention qui me joue un tour, quelqu'un qui a déplacé une strate de mon travail, ou une mouche qui s'est posée au mauvais endroit...

Depuis plusieurs mois, j'ai calculé le moment où j'allais probablement me retrouver à la rue. Pas comme une fatalité. Comme une conséquence de mon inaptitude à fonctionner comme tout le monde. Je ne peux pas mettre le paiement de mes enregistrements de voiture avant la nécéssité de me déplacer pour aller travailler. Alors...

Qui de l'oeuf ou la poule? Et qui s'en souciera dans 10 ans... (tout le monde s'en fout!).

Là, je calcule que je peux me sortir de la rue en quelques semaines, mais ce sera probablement plus long, car j'ai beaucoup de choses à affronter. Notament arriver à communiquer avec quelques personnes pour m'assurer que la coupure avec le monde qui m'entoure ne va pas devenir un piège insurmontable. Je ne peux plus communiquer verbalement depuis plusieurs mois. Enfin, disons que mes limites se sont dramatiquement réduites. Des boucles se sont installées dans mon cerveau, et il faut que je les casse. Elles sont complexes, du domaine de l'impossible.

Alors je m'organise pour écrire, le plus possible...

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