Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/07/2013

parce que manger bien, c'est bien!

Dans la rue, je m'efforce de manger le plus sainement possible. Mais ce n'est que quand je retrouve des conditions de vie normale que je me rends pleinement compte que dans la rue, on ne peut pas vivre normalement.

Cela peut paraître évident. Le fait que je le mentionne peut paraître absurde. Mais le désir de paraître, si ce n'est d'être normal force l'être à repousser les frontières de l'anormalité pour parvenir à continuer de se sentir un tant soit peu partie prenante de la "tribu".

C'est un défi de chaque instant, une charge de travail physique et mentale que personne ne peut imaginer. Il m'a fallu au delà de deux ans cumulés de vie dans la rue (approximativement le cumul du temps que j'ai passé dans la rue à ce jour) pour parvenir à cerner les mécanismes qui se mettent en place, que cela soit chez les neurotypiques ou les personnes atteintes de diverses problématiques de santé psychique ou mentale.

Premièrement, le sommeil est rarement totalement serein. Il faut être aux aguêts, même pendant le plus creux de la nuit. Il faut savoir se placer, se déplacer, arriver tard, repartir avant l'aube. J'ai développé des stratégies gagnantes. Jamais je ne me suis fait surprendre, jamais je ne me suis fait jeter d'un endroit.

Ensuite l'hygiène, pour être raisonnable, oblige à de longues heures de démarches; se rendre en un lieu propice, se laver, se raser, prendre un shampoing... sans attirer l'attention, sans monopoliser une toilette dont on nous reprochera l'utilisation. Laisser toujours propre derrière soi. Parfois faire demi-tour devant l'état des lieux que l'on nous accuserait d'avoir polué. Arriver sans tout mon bagage, pour ne pas attirer l'attention. Ce qui veut dire aller déposer mes affaires dans une consigne avant de me rendre aux toilettes... des heures de "couraillage" pour accomplir quelque chose qui prend 20 minutes le matin chez soi. Le compteur de la fatigue tourne pendant ce temps. Le peu de calories absorbées sont vite brûlées!

Puis il faut faire les démarches régulières pour entrer un revenu, les démarches et le suivi pour m'assurer des services de santé physique et mentale... Je marche en moyenne près d'une vingtaine de kilomètres par jour, dont une bonne partie chargé d'une vingtaine de kilos mal répartis dans des bagages mal adaptés.

Rien d'étonnant que mon premier désir soit d'optimiser mes bagages pour le voyage et pour la rue. Peu de gens arrivent ne serait-ce qu'à soulever et faire quelques pas avec mes sacs. Régulièrement, je souris en déposant mon sac à terre et en regardant quelqu'un essayer de le soulever. Je le fais avec une telle apparence de facilité que les gens me regardent ensuite de façon étrange.

Arrivé à midi, l'énergie a disparue. La bonne volonté ne suffit plus. Le carburant est épuisé. Avec mon gabarit et mon degré d'activité, il faudrait que j'absorbe quotidiennement 2400 bonnes calories. Quand j'en ai pris 400 le matin, la machine ne veut juste plus avancer le midi. Et le déficit est déjà tel à la mi-journée que plus rien ne peut permettre de rattraper le retard.

Alors je continue d'avancer au ralenti, pour me dire que j'accomplis quand même quelque chose. Mais les résultats sont décevants. Régulièrement, je m'aperçois que ça où rien... Alors le moral prend une claque et tout devient plus dur encore.

Et puis tout à coup, les circonstances changent. Et tout repart comme si de rien n'était. Les calories absorbées le matin dans le calme donnent du jus jusqu'à midi, voire même plus loin. La petite douche rend serein, et dynamise le métabolisme stimulé. Vous ne pouvez pas imaginer comment on sent, comment on ressent tous ces détails. Et c'est une richesse que je n'aurai pas soupçonné auparavant.

06:38 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)

Les commentaires sont fermés.