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02/04/2016

sans aigle...

Sans bottes, ni culottes non plus...

Un départ sur les chapeaux de roues, une fois de plus... billet acheté à l'arrache 24 heures avant le départ... et des histoires dès l'aéroport que je ne puis raconter sans risquer de semer l'émoi dans ce monde terrorisé!

Mais bon, début Janvier, atterrir à Reykjavìk, sous une météo clémente, puis s'envoler vers Paris en survolant une tempête impressionante que je reverrais depuis le bord de mer deux jours plus tard...

C'est un nouveau contact avec la terre qui m'a vu naître et mourrir, puis m'enfuir pour renaître de mes cendres à nouveau.

Et mourir encore, et renaître... c'est une maladie, chez moi, la résurrection!

Paris, choyé que je suis dans Montmartre, "walking distance from the place I was born".

Et vivre à nouveau des moments énormes. Oui, trop peu, mais pourtant tant...

Comment pourrais-je me plaindre. Je ne me plains pas en fait. Jamais, je crois. Je cite parfois des faits, je sermone l'injustice et tance le mal, sans relâche. Répététivement, jusqu'à l'épuisement. Le miens et celui des malheureux qui croisent mon chemin rocambolesque parfois. Pas par bravade, sans bravoure, par reflexe ou par incapacité de faire autrement probablement!

Depuis quelques mois, j'ai pris la décision de renouer avec quelques passions; la moto, le vol (celui dans les airs... pas l'autre, qui n'a jamais été une passion pour moi, il va sans dire!), l'équitation.

Comment vous dire... comment résumer? Il me tarde de vous dire plus complètement. Si vous pouviez savoir, si vous pouviez comprendre l'incompréhensible. Comment dirais-je? Comment exprimerais-je...???

Alors je découpe à l'emporte-pièce. Lance des messages, bouteilles à la mer en espérant... Avez-vous vu le degré de pollution de cette mer. Savez-vous que lors de ma dernière navigation, je n'ai jamais passé plus de 20 minutes en pleine mer sans voir des déchets, des bouteilles de gaz, des sacs plastiques, des barils vides, des nappes d'huile. J'ai traversé le triangle des Bermudes sans voir d'avion, mais en constatant la navrante réalité d'une pollution qui a envahi le moindre recoin de ce monde désolant à tant d'égards.

Et quand je pense à la mer, je pense à Manfred très souvent. Et à Christian aussi... et à Michel!

Et j'ai mal de ne point arriver à recréer ces liens à la vie, ces liens au monde qui m'entoure, enfermé dans l'autisme qui me cloue à mon calvaire.

Et je tente pour la nième fois de démarrer ce gros monocylindre de 600 cc. Allez, je n'aime pas trop, mais bon, un shoot d'éther...

Yamaha,Tenere 600

Et "broooum!", le voilà parti! Et me voilà parti aussi, la poignée des gaz dans la seule position que je lui connaisse; à fond!

Vous ais-je dit? Aucun de mes potes motards n'a survécu. Moi, j'ai racroché le temps de me faire assez peur pour devenir raisonnable. Bon, je sais, peu de mon entourage me trouve raisonnable, mais bon, ça, c'est une autre histoire!

Et je mets un casque, une paire de gants, et vais me régaler sur la petite route du littoral breton, sous les quelques rayons de soleil bienvenus qui enchantent ma virée.

C'est décidé, je reviens bientôt vous voir. Manfred le premier, probablement. Puis un grand tour de France, pour boucler des boucles, ou en transformer en sac de noeuds. Rien n'égalera ceux de mon cerveau anyway!

Et je balance la moto dans la courbe, puis accélère doucement en anticipant les conditions comme  tous mes sens me l'indiquent. Et je suis à nouveau avec Alain, avec Philippe, avec Jean-Marc, avec Didier, à tirer la bourre dans un monde imaginaire ou les chauffards, les imprévus n'existent pas...

Oui je reviendrai, me préparerai un peu mieux, prendrai rendez-vous avec vous pour partager un temps sans concurrence!

 

14/02/2016

La mer créant...

Le vent souffle encore, levant à nouveau une houle puissante. Je marche lentement sur le sable mouillé de la plage, savourant chaque instant de ce spectacle grandiose. Je ralenti chacun de mes pas comme pour prolonger la magie de ces moments. Des rafales projettent la pluie en larges bandes grises dans le ciel. Je me réfugie sous un grand pin parasol pour mieux apprécier le spectacle. Mon cerveau s'emballe. Les souvenirs, les émotions sans fin que génère en moi la brutalité de la nature, me transportent dans un monde où seul je suis.

Et je regarde cette vague qui se lève au loin, déferle bruyament sur les récifs, se transforme en onde pour se lever à nouveau et mourir dans un ultime fracas sur la plage. Et je réalise à cet instant tout ce qui a contribué à cet éphémère spectacle. Le vent, loin sur la mer, qui a soufflé et soulevé des montagnes d'eau, pendant des jours, pour faire grossir la houle jusqu'à des proportions gigantesques. Et après un parcours impitoyable, ces masses d'eau viennent mourir dans un dernier éclat, m'offrant à chaque fois un dénouement tragique unique.

Et j'observe cette succession de vagues, réalisant pleinement pour la première fois l'unicité de chacune d'entre elles. Et je pense soudain à ce qui me fascine le plus dans la mer; que chacun de ces instants est unique. Chacune de ces images que j'ai gravé dans ma tête depuis la première fois où j'ai observé la mer ne vit plus que dans ma tête et quoi que je fasse pour tenter de les partager, personne ne saura réellement ce qui m'a imprégné à chacun de ces instants.

Et je pense à ces milliards de vagues qui se sont écrasées sur ces inombrables plages, rochers, récifs ou falaises, depuis des temps immémoriaux. Qui peut les compter? Qui peut les sonder?

Je regarde ces grains de sable sur la plage et je pense à ces milliards d'humains qui sont passé sur cette terre, qui y vivent ou survivent, chacun différent, mais se ressemblant finalement tellement quand même, malgré tout ce que l'on veut nous faire croire.

Chacune de ces âmes, qui peut les sonder?

Qui dira que cette vague que j'ai vu est si dissemblable de cette autre. Qui dira que ce grain de sable ne vaut pas cet autre? Qui peut prétendre que cet humain qui respire à nos côtés n'aspire pas aux mêmes idéaux que nous?

22/01/2016

Pen Kiriac

En ouvrant la porte-fenêtre de ma chambre, alors que le jour pointe à peine, j'entends le mugissement de la mer. Je suis arrivé salué par ma mère-mer. D'un grand coup de vent, traîné dans le sillage de mon avion. Juste à temps pour lever une houle déchaînée qui donne à la côte déchirée toute sa beauté. C'est comme cela que j'aime que la vie souligne mes souvenirs! C'est comme cela que j'aime la mer. Je ne connais que cela; la passion déchaînée! Je n'ai jamais eu de mesure. Et ses coups de gueule, je les prends comme un salut, comme un shoot d'énergie vive, brutale, vitale.

Ce moment passé à Paris enterre pour l'instant cette longue étape rocambolesque de ma vie. Je fais les cent pas à la gare du Nord, me remémorant les mille traits de son visage, que je n'ai vu depuis si longtemps. J'essaie d'imaginer les changements, les marques du temps. On ne se reconnaîtra probablement que par déduction!

Je m'approche d'un sdf. Je suis, je serai toujours un peu... Un peu de luxe aussi! Il me tends la main, pas ouverte, un salut. Cela confirme... tout est dans le regard je crois. Je la serre chaleureusement. On échange quelque mots. Je lui donne de quoi se payer un café. Je reste autiste. Maladroit. Incapable de communiquer comme je l'aimerai.

Quoi dire, sans dessiner un contexte d'une complexité telle que tout propos s'en trouverai noyé, brisé sur les récifs de cette Pen Kiriac.

Comment peut-on passer au travers de tout cela, comme ça?

Dans ce groupe de travail, il y a quelques semaines, dans le cadre d'un M.O.O.C du MIT (M.O.O.C; Massive Online Open Course, une formation de masse en ligne. MIT, Massachussets Institute of Technologie, université de Cambridge, près de Boston, USA), une personne, thérapeute auprès de gens en situation post-traumatique, m'a qualifié de "survivor", survivant, après n'avoir entendu qu'une brève présentation de mon contexte de vie. C'est en fait le mot dont j'avais besoin pour me redéfinir.

J'ai pu commencer à mettre des mots sur ce que je suis. Des mots sur ce que la vie défini de nos traits, dans le meilleur comme dans le pire.

J'ai fait la paix avec moi-même. Je suis fier d'avoir survécu sans compromission, même dans les pires circonstances.

Je retrouve une France bien abîmée. Elle a glissé sur la pente que je voyais déjà lorsque je l'ai quittée. Que peux devenir une nation rivée devant PBLV? Consternation lorsque, il y a quelques mois, j'ai découvert ce qui se cachait derrière ces quelques lettres...

 

03/05/2015

Le temps...

Bien difficile d'expliquer ces périodes "d'absence". Ce sont des périodes d'absence de vie. Ou plutôt d'absence d'interactions. Des périodes où toute interaction avec le monde est impossible pour moi.

Je passe au travers de mes archives. Cela fait trois fois que je les allège.

Et je réalise que certains ne peuvent comprendre certaines choses...

Sdf, de luxe. Ce paradoxe de se retrouver à la rue et de penser qu'on est encore dans le "luxe" parce que l'on a une éducation, une compréhension, des capacités que d'autres n'ont pas. Mais en bout de ligne, c'est idem... on est sur le fil du rasoir. On se maintient à coups de pouces, à coups de mains et de claques, dans le dos ou dans la face... c'est selon!

J'essaie actuellement de déterminer les paramètres influents de ces quelques personnes qui peuvent avoir accès à moi presque en tout temps, quel que soit mon état, sans risquer de me destabiliser.

Mon fils, bien sûr...

Mais en dehors de cela...???

Des personnes pouvant rester des heures près de moi sans parler. Échangeant juste au niveau non-verbal.

La première fois que cela m'est arrivé, c'était avec une amie de lycée. On s'aimait beaucoup. Je l'avais invité au restaurant. On avait passé de longs moments sans parler, juste à apprécier la présence l'un de l'autre. À un moment, elle m'a dit: " Ce que j'aime avec toi, c'est qu'on n'a besoin de rien près de toi. Pas besoin de meubler, de faire semblant. On reste là, sans parler, et ça suffit pour être bien. C'est bien. C'est précieux!"

À cette époque, point d'autisme (point de conscience d'autisme, devrais-je dire...).

Mais déjà ces immenses gouffres, ces abîmes où je me perdais et où peu de gens pouvaient me rejoindre.

Des personnes avec un language non-verbal qui "me parle". Là encore, difficile à expliquer. Des personnes dont le language non-verbal est en accord avec leur language verbal. Bien plus rare que ce que l'on voudrait croire en réalité. Je lis le non-verbal en premier lieu. En "langue maternelle"...

Et tout ce qui ne colle pas me perturbe à un point difficilement imaginable.

Des personnes bienveillantes face à mes handicaps. Des personnes qui savent mettre la perspective nécessaire entre ce que je fais et mes capacités. Ou plutôt mes incapacités, mes limites...

 

En général, ces périodes finissent par le biais d'un choc. Un choc que je provoque, ou que la vie provoque.

Ce soir, beaucoup de choses en suspend. Trop. Un peu de tension, mais aussi la poussée du printemps, l'accumulation des efforts que je mets à avancer. Je peux pousser, mais je dois conserver la conscience des limites. Ou la rejeter peut-être...

J'ai tant de choses à livrer, à exprimer. Tant de choses qe je n'ai jamais su faire comprendre comme je l'aurais voulu. Comme j'en aurais eu besoin.

Trois heures du matin. Un bon repas... Une bière en reprenant contact avec la réalité, des fruits de mer, des légumes vapeur... un verre de vin blanc en mageant... un deuxième...

Un verre de téquila... un deuxième! Ce n'est pas tous les jours samedi. Et demain c'est dimanche. Euh, non, on est déjà dimanche!

Je ne bois pas souvent. L'alcool est hors de prix ici. Mais je trouve ça bien. On paie moins d'impôts et de taxes sur le reste. L'alcool est un luxe, et je préfère le voir taxé lourdement que  de voir quoi que ce soit d'autre rendu inaccessible aux plus démunis.

Et je me sens dans une de ces périodes où les choses reprennent un ordre gérable.

Juste à temps pour le printemps. J'ai pu maîtriser la chute de l'hiver. J'ai un peu engraissé, comme souvent en fin d'hibernation. Contrairement aux ours, j'avais un garde-manger garni pour une fois.

Alors comme les cons, je cours pour brûler les excès. Huits kilomètres à ma première sortie. Même pas mal!

Je ne cours pas souvent non plus...

22/02/2015

Watching the daisies grow...

Il est des choses si complexes dans les méandres des boyaux de mon cerveau que bien des éléments de la vie courante s'y trouvent bloqués. Le seul moyen pour moi de parvenir à dénouer ces enchevêtrements inextricables, c'est d'analyser mes cycles, de trouver les moyens de les chevaucher en me laissant porter par leur imprévisible galop, et... d'être patient!

Heureusement, je suis extrèmement patient. Au point de regarder le monde tourner sur lui-même, alors que je suis dans une imperturbable immobilité.

Je suis parfois figé dans l'inénarrable, sordide et invalidante condition de sdf, survivant dans la jungle urbaine des rues sans pitié. Parfois délétère attente d'un improbable geste d'un proche trop lointain pour seulement imaginer que je suis dans le besoin. Parfois fantasmagorique rêve d'une rencontre idylique qui viendrait venger l'attente vaine des ces parents imaginaires que je voyais m'enlevant à mon quotidien insupportable d'une enface passée à rentrer le cou pour mieux encaisser les coups.

Il m'a fallu trois ans dans la rue avant de me forger la certitude que rien ni personne ne me sortirai de la précarité. Il m'a fallu plus de temps encore pour accepter que cela était dans la "normale" des choses. Que bon, dans les romans il y a bien des princes qui vont dévoiler la princesse sous les haillons, mais jamais l'inverse! Ah, ce sexisme... il s'infiltre partout!

Depuis mon diagnostique officiel et la définition précise de mes limites et de mes capacités hors du commun, je peux dessiner des voies tirant profits de ces dernières en évitant les pièges de mes faiblesses.

Je vis en permanence des vies parallèles. Une qui gère constament mes incapacités et tente de compenser, une qui tente vainement de définir la zone grise entre les rêves et la réalité. Une qui cherche à réparer à chaque instant les modèles d'interaction sociale qui semblent s'auto-détruire aussi vite qu'ils se construisent. Tout cela se passe à l'abri des regards, profondément enfoui dans les méandres des boyaux de ma tête.

Extérieurement, peu transparaît.

Intérieurement, c'est un chaos fractal que seule la puissance mathématique de mon cerveau permet de maintenir en état de marche. À peu près...

J'aime l'idée de ces quelques âmes soeurs avec qui je partage une profonde amitié. J'aime pouvoir tomber amoureux d'une plume, m'unir en communiant au travers d'une symbiose osmotique sur un sujet, sur des idées, des émotions...

Alors quand le film "Imitation game" est sorti, je me suis souvenu de "Codebreaker", ce film documentaire regardé d'un oeil distrait il y a quelques années et que je redécouvre avec plaisir ce soir.

Ce qui me frappe, comme un train lancé à pleine vitesse, c'est ce dessin de la mère d'Alan Turing, qu'elle a intitulé "Watching the daisies grow".

Alan Turing,autisme,sdf,ittinérence

Ce dessin, c'est mon enfance, c'est ma vie, c'est ma vie dans la rue... Ce dessin, c'est la puissance de mon cerveau que je  ne peux maîtriser, que je ne peux contraindre à aller dans une direction "utile" sans aide. Oh, je n'ai pas besoin de beaucoup d'aide. Juste un peu, juste une assurance de l'inaliénabilité d'un lien...

Il y a quelques jours, je ne voyais plus aucune solution que de retourner dans la rue. J'ai passé le cap, tout seul, avec l'aide d'un peu de chance...

Une de ces âmes soeurs me suggère qu'il vaut la peine d'aller voir en salle Imitation Game. Je ne peux oublier ce "Cri d'un chameau sauvage" qui m'a ouvert les yeux sur une des réalités de la vie que je ne pouvais concevoir dans ma petite tête d'autiste!

18/02/2015

Toi-même!

Il est un site web qui me fait régulièrement mourir de rire!

http://www.viedemerde.fr

C'est un site également parfois très instructif. On y apprend même des mots de la langue française!

Voici une petite perle...

Aujourd'hui, mon fils de neuf ans a désigné le chat en disant "le nyctalope". Je lui ai fait comprendre qu'il ne devait pas dire de grossièretés. Il m'a expliqué que "nyctalope" voulait dire qu'il pouvait voir la nuit. VDM

Bon, j'avoue qu'il n'y a pas si longtemps, si après avoir parlé de mon acuité visuelle nocturne hors du commun l'on m'avait dit "le nyctalope", j'aurais peut-être pensé "nyctalope toi-même"! :-D

21/01/2015

Rester droit...

Pour pouvoir continuer à se regarder dans le miroir... ou fléchir, pour ne pas mourir et ainsi pouvoir également continuer à se regarder dans le mirroir!

Mon père est mort quand j'étais enfant, dans des conditions dramatiques, pour avoir sous-estimé la force d'un oppresseur. J'ai souvent été hanté par cet évènement. Je me suis souvent posé la question; jusqu'où résister? Quand plier pour ne pas devenir une victime inutile?

Récement, le plus âgé de mes frères m'a demandé si je me souvenais de Joseph. Des Joseph, je n'en ai pas connu beaucoup. Le premier nom qui m'est venu à l'esprit, c'est ce Joseph que j'ai connu à mon entrée en sixième, en France (plus ou moins secondaire 1 au Québec). Il était seul, dans son coin, dès le premier jour victime de son allure, de son attitude. On devait faire des équipes de travail. J'ai été le premier choix de la plus jolie fille de la classe. Je lui ai demandé de choisir Joseph. Elle a accepté. Cela a permis à Joseph d'avoir une année de tranquilité. Je l'ai protégé de mon mieux toutes mes années au collège, même si nous n'étions plus dans la même classe par la suite.

Joseph, aujourd'hui, ne cesse de parler de moi à mon frère. Je n'ai jamais eu honte de lui, jamais évité de le saluer, honte de dire que c'était une gentille personne quand on le dénigrait devant moi, quand on essayait de me ridiculiser de le compter parmis mes amis. Je suis très fier de cela, aujourd'hui plus que jamais.

Alors ce soir là, quand j'ai reçu des menaces d'un repris de justice à qui j'ai donné du travail pendant quelques semaines, et qui essayait de m'extorquer de l'argent en me menaçant, j'ai mal dormi.

Parce que oui... je ne vous ai pas dit... ma situation s'est améliorée depuis quelques mois. Logé, avec du travail bien rémunéré, même si encore un peu précaire.

Cet homme, un mètre quatre- vingt quinze, cent-dix kilos de muscles, avec des mains comme des battoirs, à tendance violente avouée, m'avait proposé d'aller voir une camionette "pickup" à vendre près de chez lui. On a tourné 45 minutes dans son quartier, il était incapable de retrouver l'endroit. Puis le véhicule a refusé de démarrer. Quelques jours plus tard, il me dit que je lui dois une commission si j'achète le véhicule. Ma réaction initiale est le dégoût. Tu veux me vendre quelque chose, tu me le dis. Tu ne fais pas croire que tu veux m'aider puis ensuite essaye de m'extorquer.

D'autant que j'ai été obligé de le virer de mon chantier parce qu'il se cachait pour tirer au flanc. Je passais sur son incompétence, sur son incapacité à travailler sans supervision, même si c'était ce dont j'avais le plus besoin. Mais le surprendre régulièrement caché dans un coin, faisant semblant de travailler quand il se voyait découvert... ça, je ne suis pas capable de le supporter!

Une semaine après son renvois, je le contacte pour lui dire que je vais acheter la camionette. Il m'envois promener, me disant que la camionette, il n'en a rien à foutre, que c'est du travail qu'il veut. Je ne lui aurait pas payé ce qu'il demandait, mais j'étais prêt à le "dédommager" (je mets entre guillemets, parce que c'est plutôt lui qui aurait dû me dédommager pour avoir abusé de ma gentillesse et de ma patience, car il a réellement été dommageable pour mon travail!). Quelques jours plus tard, lors d'un échange de sms, je lui répète que je veux acheter la camionette, et j'obtiens la même réponse.

Environ un mois plus tard, la amionette étant toujours en vente, je décide de l'inspecter, de l'évaluer et finalement je l'achète. Quelques temps passent, et je reçois un sms de sa part. Il avait appris que j'avais acheté la camionette et me réclamait une commission, assortie de menaces de s'en prendre à moi et de démolir la camionette si je ne payais pas.

J'ai évalué la situation sous tous les angles. Ce gars est le genre de personne à s'attaquer aux plus faibles. D'accord, si il devait s'attaquer à quelqu'un de son gabarit, cela réduirait le choix à peu de choses. Ce n'est pas une raison!

Ce gars, c'est le genre de personne qui devait intimider et abuser des enfants plus faible que lui dans la cour d'école.

Je n'ai eu aucun parti-pris quand il m'a parlé à mots couvert de son "temps en dedans". Je n'ai voulu savoir ni pour quoi ni pour qui. Je lui donnais une vraie chance. Il est des gens qui ne savent pas les saisir. Qui vont systématiquement emprunter le chemin des problèmes.

Mais ce soir-là, je pensais à mon père. Je pensais au fait que ce gars pouvait mettre sa menace à exécution. Que cela risquait de dégénérer et que je ne faisais pas le poids. Il fallait user de mes forces. J'ai demandé conseil à une amie. Elle me connait bien, et elle l'a vu à plusieurs reprises. Elle connait aussi ce genre d'individus. Elle m'a dit "paie-le".

Non, je ne peux pas! Je ne peux pas plier devant ce genre de personnes. Pas devant ce genre de personne qui va intimider, maltraiter les plus faibles que lui sans hésitation. Ce gars là, pour moi, c'est le symbole de l'injustice du monde. Au Canada, on utilise le terme anglais de "bully". Le mot "intimidateur" ne le traduit que mal. Ce genre de personnes qui pousse des enfants vulnérables au suicide, qui rend infernal un chemin qui devrait être une période heureuse, et la plupart du temps dans l'indifférence générale.

Mon cerveau était en ébullition. Ma raison malmenée. Je risquais de me retrouver sans véhicule, à faire face à une agression, me retrouver à nouveau dans une situation délicate.

Oui, mais que faire? Abandonner tous mes principes sous la menace? Impossible!

Alors j'ai répondu non! J'ai argumenté avec lui, terminant chaque échange par la même sommation; viens me voir, face à face, et on va en parler.

Il a fini par abandonner.

Aujourd'hui, je suis fier de m'être tenu debout devant cette personne. Ça ne change pas le monde, je sais. Il va surement continuer d'essayer d'intimider. Aurais-je dû le démolir? J'aurais peut-être pu le renvoyer derrière les barreaux. Est-ce que cela aurait changé quelque chose pour le mieux chez lui? La prison rend rarement meilleur celui qui en sort.

Merci Vic pour cette vidéo qui illustre un autre moyen de résistance. L'important, c'est de résister!

http://www.youtube.com/watch?x-yt-ts=1421782837&v=PIH...

(Désolé, la plate-forme refuse l'intégration du lien... une fois de plus. Cela commence à me fatiguer!)

 

 

01/12/2014

L'ordre naturel des choses...

Le méchant loup qui mange la mère-grand, celui qui mange la chèvre de monsieur Seguin, celui de Pierre, le demi-loup Croc-Blanc, bon parce que juste moitié loup, mais moitié "civilisé"...

Et moi tiraillé entre la sauvagerie de la nature et celle de l'homme. Laquelle est la pire? Laquelle est la plus supportable?

Et moi, moitié sauvage, moitié "civilisé"...

Et ce besoin d'aller toujours jusqu'au bout! Au bout des clichés, au bout des raisonnements.

Alors, aussi incroyable que cela puisse paraître pour ceux qui me connaissent dans la vraie vie, je suis allé me chercher un permis de possession d'armes à feu, pour aller chasser...

Pas eu besoin d'aller bien loin. J'ai tout fait par internet. C'est assez impressionnant.

Impressionant aussi de se retrouver avec un 30/30 Winchester entre les mains. Ouais, le fusil de mes rêves de gamin, quand je traversais les montagnes Rocheuses à la poursuite de Croc-Blanc, sous les lignes de Jack London. Ce calibre mythique, capable d'arrêter la charge d'un orignal (mais il ne faut pas se rater et tirer à moins de 50 mètres!).

En arrivant en Alberta, je me suis dit que je me devais d'aller chasser, car je n'étais pas prêt à devenir végétarien et que l'industrie de la production de viande est plutôt pourrie, d'un bout à l'autre de la planète.

Ici, la chasse est un moyen de préserver l'équilibre naturel. On peut bien sûr argumenter que la nature peut très bien s'en charger. Mais à quel prix? Une prolifértion de prédateurs déciment le gibier, entraînant une famine décimant ces mêmes prédateurs, permettant un redressement de la population du gibier... Le tout s'étalant sur quelques décénies...

La chasse est très réglementée et structurée pour maintenir un équilibre année après années au Canada. Et particulièrement en Alberta. Le gibier y est considéré comme une ressource naturelle et le maintient des populations animales est une science surveillant les paramètres naturels sur une base permanente. Et au moins, on se procure une viande saine, sans antibiotiques et sans hormones!

Un animal sauvage au moins a une vie décente et ne voit pas venir sa mort qand elle est donnée à distance par une arme à feu. C'est une mort bien plus décente et rapide que celle donnée par les prédateurs locaux; loups et coyottes principalement. Les coyottes particulièrement! Ils sont capables d'attaquer sans crainte presque n'importe quel animal. Au printemps, dans les boisés de la "River Valley", au coeur d'Edmonton, ils ont tué des chiens que leurs maîtres promenaient en laisse. Les chiens et les chats qui disparaissent sous leurs crocs sont innombrables!

Mais ils s'attaquent mêmes aux orignaux et au bétail domestique.

Alors quand un ami m'a proposé de m'emmener chasser le cerf, je n'ai pas hésité. Et bien que me questionnant en permanence sur ce qui se passerait quand je serai en position de tir, le gibier dans ma mire, le doigt sur la gachette... l'esprit divisé entre toutes les "bonnes" raisons de tirer et cette repulsion à donner la mort à un animal... qui peut prétendre connaître infailliblement ses réactions dans cette situation?

Mon 30/30 Winchester calé sur mon épaule, la joue collée sur la crosse, l'oeil alignant la mire, je me torture l'esprit à imaginer ce qui suivra... la fierté de mes partenaires de chasse, la tâche ardue de ramener la prise du mileiu des bois, le dépeçage et la préparation de la bête... le coeur complètement oppressé par cette inconnue couleur sang!

05/11/2014

Smooth Operator...(2)

Alors, comment on fait, hein, quand on a dit qu'on peut piloter une pelle mécanique et qu'il faut passer des mots aux actes?

Et bien on organise un chantier où l'utilisation d'une petite pelle mécanique sera nécessaire.

Trois jours m'ont suffit pour faire cela. Le jour "J", la pelle mécanique m'est livrée sur le chantier. Deux minutes d'observation de la bête pour essayer de comprendre comment tout cela fonctionne tout en donnant l'air que je fais une inspection de routine.

J'ai passé des heures à observer les conducteurs de pelle dans ma vie. Tout gamin, c'était la fascination de la puissance de ces machines qui vous creusent des fondations, vous déplacent des montagnes en un clin d'oeil, démolissent des bâtiments...

Cette fascination est restée, doublée d'un désir d'évaluer tout le travail mécanique, les puissances nécessaires aux différents points de force, la puissance du moteur nécessaire pour fournir ces efforts colossaux, la résistance des axes des sections du bras de la pelle... Je crois que c'est cette dernière qui retient le plus mon attention. Le cerveau de l'autiste en pleine action!

IMG_0761.JPG

Ma connaissance mécanique ajoutée à tout cela... et je m'installe sur le siège d'opérateur, mets en marche le diésel de la bête, et commence par de toutes petites commandes, à actionner les leviers en faisant style que je sais ce que je fais. En réalité, je n'ai aucune idée de ce qu'actionnent tous ces leviers. Réellement aucune idée! Alors je procède par minuscules mouvements, pour voir quel verin est actionné par chaque mouvement de chaque levier.

Mon employeur, venu sur  les lieux pour l'occasion, m'observe attentivement. Cela me prend vingt secondes pour actionner tous les leviers dans tous les axes. Comme les mouvements sont imperceptibles, personne ne se rend compte de ce que je fais.

Alors que je commence à déplacer la machine pour la faire descendre de sa plate-forme de transport, mon employeur me fait signe de relever la lame niveleuse que je n'avais pas vu. J'actionne sans hésiter le seul levier que je n'avais pas testé (car pas vu, petit, sur le côté droit... on ne le voit pas sur la photo!). Puis je mets les gaz et descend d'une traite la machine au sol. La machine est sur chenilles. C'est bien sûr la première fois de ma vie que je pilote une machine à chenilles également. Là aussi, je connais le principe, appris dans "Jo, Zette et Joko". ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Aventures_de_Jo,_Zette_... ).

Vous ne pouvez même pas imaginer comment je suis explosé de rire en réalisant cela. Souvenir d'enfant... Cet album mité, trouvé je ne sais où, et Jo qui se retrouve aux commandes de cet espèce d'amphibie à chenilles, et qui dit "Ces leviers, cela doit commander les chenilles... celui de gauche pour la chenille gauche, celui de droit pour la chenille droite!"

J'ai longtemps observé également les opérateurs des "chenilletes" qui déneigent les trottoirs l'hiver, à Montréal.

Sur un engin à chenilles, pas de volant donc. Pour tourner à gauche, on ralentit la chenille gauche, pour tourner à droite, on ralentit la chenille droite! Enfantin

On peut même tourner sur place en mettant une chenille en marche avant et l'autre en marche arrière. Bref, c'est un concept parfaitement intégré dans mon petit cerveau d'autiste depuis fort longtemps. Et le passage du concept théorique dans ma tête à la réalité sur le terrain se fait instantanément et sans heurt.

Ensuite, et bien je me suis dit (j'y avais déjà pensé depuis longtemps!) que ce bras de pelle serait le prolongement de mon bras, que je commanderai méacaniquement, comme une prothèse. Ça a bien fonctionné. Après quelques heures, cette pelle mécanique était devenue une espèce de morceau de moi-même.

Je peux changer de prothèse et passer à la taille supérieure maintenant. J'ai une excellente perception de l'espace et des distances. Ça va se faire tout seul!

J'ai des supers vidéos. À éditer ultérieurement...

26/10/2014

Je hais Walt Disney

Pas d'une haine aveugle, injustifiée, mais simplement à cause de l'analyse de ce monde qu'il a créé pour (détruire) les enfants!

Tout petit, j'ai lu dans un "Journal de Mickey" comment Walt Disney avait commencé à dessiner des souris (en fait, des mulots...) parce que "le pauvre", vivait dans une maison où les mulots tentaient de trouver refuge l'hiver approchant.

Je trouvais cela "sympa".

Puis j'ai vu "Bambi", "La belle au bois dormant"... traumatisé , le gamin!

Transposition du plus sordide du monde des adultes dans un univers propre à refléter la vision adulte d'un monde d'enfants, remplis de mystères, d'inconnu, de terreurs...

Des terreurs, j'ai dû en affronter de nombreuses.

Le "papa" de Bambi, tué par les chasseurs... mon popre père, tué  par des "chasseurs".

Quelle perversité peut-elle être à l'origine de scénaris faisant avaler à des enfants des modèles les plus ignobles du monde des adultes? Et avec quels résultats?

Lequel de ces mondes, de ces personnages, va-t-il influencer une âme au point de la forcer vers la plus ignoble des perversité? Quellle âme va-t-elle trouver plus profitable de s'identifier à la sorcière plutôt qu'au prince charmant, au point de faire siennes les pires des vilainies?

Je me souviens comme si c'était hier du visionnement du film "Bambi", au cinéma. Nuits sans sommeil... comment des gens (les chasseurs) peuvent-ils être méchants au point d'enlever au petit faon son papa?

Dans la vraie vie, le cerf saute la biche et se fout totalement du faon. Le faon n'a pour seule référence que sa mère, jusqu'au jour où il fout le camp pour prendre son indépendance. Il se fout alors totalement de sa mère!

Et un petit garçon qui perd son père ne sera en rien préparé à ce drame parce qu'il a vu "Bambi".

Bref, pour moi, un film pour enfants, c'est un film qui se doit de montrer les belles choses du monde qui nous entoure.

Un documentaire pour enfant peut montrer certains aspects des difficultés de naviguer dans la société qui nous entoure, des dangers, des risques... quand l'enfant atteint un certain âge.

Les films de Walt Disney ne m'ont pas traumatisé à long terme. Ils m'ont nuit, sans pour autant laisser de traces permanentes.

Je n'ai pas emmené mon fils à Disneyland, alors que nous sommes passé à quelques kilomèrtres de là. Par principe. Je n'ai pas fait voir à mon fils "La belle au bois dormant", ou "Bambi", par principe, par volonté morale. J'ai préféré lui montrer la vraie vie, en le faisant naviguer, voyager...

Pour ceux qui n'ont pas vu les images (dsl, impossible d'incruster... Google ou la plate-forme H&F m'interdit... bug ou volonté commerciale?)

http://www.youtube.com/watch?v=26AEBJf3ny0

Pourquoi cette diatribe sur Disney?

Et bien en fait, hier, après m'être convaincu de la présence de mulots dans l'isolant des murs du rez-de chaussée de la maison où j'habite en observant les trois maître des lieux, deux gros matous et une minette minette (mais depuis, j'ai vu une minette encore plus minette... tellement minette qu'il faudrait que je l'écrive, Ella me parait bien moins minette!).

Bref, je suis un chat, je vois la nuit mieux que la majorité des humains, je me déplace silencieusement et ne manifeste ma présence que sporadiquement et très délicatement. Et... je parle chat!

Je peux vous dire où sont les souris, à quel degré elles sont accessibles...

C'est Ella qui a ouvert le bal, en se couchant devant le lave-vaisselle. Puis elle s'est couché devant un placard (je savais à ce moment qu'il y avait plusieurs mulots!). Je lui ai ouvert la porte. Elle s'y est engouffrée, mais bloquée par les boîtes, elle ne pouvait rien faire. Quand j'ai déplacé une de ces boîtes, elle a pris peur. Ninja est venu prendre la relève. Le gros matou sait ouvrir la porte du placard d'une patte puissante et très habile. Après avoir fouiné pendant quelques minutes, il commençait à déséspérer. Je suis alors venu à son aide. Quand j'ai déplacé la première boîte, il a bondit de l'autre côté du placard. Il restait peu d'options à la malheureuse souris. Je "savais" qu'elle était dans le recoins droit, derrière une boîte que je me suis empressé d'enlever. Ninja n'a fait qu'un bond. Je n'ai même pas eu le temps de voir qu'il filait et courrait à l'autre bout de la pièce. Je l'ai vu farfouiller dans sa gamelle, puis revenir vers moi triomphant, la souris entre les dents, me demandant de lui ouvrir la porte de sortie. Je l'ai vu ensuite s'amuser avec la petite souris sur la pelouse... Même pas mal! C'était une p*tain de souris qui pourrissait l'isolation de mon rempart contre le froid l'hiver. Et f*ck les mickey mouse de la terre. Qu'ils crèvent sous les crocs des chats, parce que c'est comme ça la vie!

Ce soir, Ninja est venu me voir pour m'inviter à une nouvelle partie de chasse, parce que franchement, la veille, j'avais vraiment assuré.

J'ai refusé. Les copains, c'est sympa, mais faut pas exagérer quand même!

24/07/2014

Contrastes...

Assis au bureau de ma chambre, je regarde dans le rétroviseur de ma vie...

Ces nuits dehors, il n'y a pas si longtemps, par moins vingt-deux degrés... visiter les peurs les plus violentes... l'itinérance, la brutalité de la rue...

Et je suis aujourd'hui dans un paradoxe amusant; pour quelques nuits dans une chambre d'hotel de luxe je n'ai toujours pas de logement, mais un travail bien payé. Je suis en déplacement pour mon travail et je découvre l'Alberta un peu plus en profondeur...

Je commence à avoir la bougeotte, des fourmis dans les orteils. Envie de me frotter d'un peu plus près à la nature sauvage de l'Ouest canadien, aux activités maintenant à ma portée...

28/03/2014

Quand souffle l'Harmattan!

À la barre de ce lourd ketch en ferro-ciment de plus de quatorze mètre, je regarde l'aube pointer son nez. L'odeur est arrivé dans mes narines comme un boulet de canon. Une odeur acre, sèche comme coup de trique, presque suffocante. Avec la lumière du jour qui commence à éclairer le pont, je vois une quantité invraissemblable d'insectes de toutes tailles et de toutes sortes joncher le pont, asphyxiés dans la rosée qui s'y est déposée dans la nuit. Le pont est également recouver d'une fine couche de sable rouge pâle.

Elle est là, tout près, cette terre mythique, masquée par la brume. Elles sont là, toutes ces légendes, imprégnant l'air que je respire. Ces images, ces fantaisies fantasmatiques tournent comme des fantômes entre mes deux oreilles, voilent mes yeux d'halluciné, déforment ma réalité de leur puisante aura.

C'est la terre de mes ancêtres qui est venue m'accueillir avant même que je ne puisse la voir! Une sensation étrange d'exaltation, d'émotion, m'étreint. Une brume dense entoure le voilier. J'ai l'impression de flotter dans mon imaginaire perturbé par les planches des passagers du vent, les souvenirs de mon père, les histoires de ma famille, de mes ancêtres.

(...)

Je ne l'apprendrai que bien plus tard, mon grand-père est enterré exactement vis-à-vis de notre position de ce jour, juste là, au bout de la brume, à quelques kilomètres à l'Est, dans la ville de St-Louis du Sénégal!

Extrait de "Les neuf vies du Tatou; 3ème vie du Tatou: la réduction humaine"  Copyright 1988-2014  Sylvère Moulanier

Ce troisième volet de ma vie débute lorsque j'ai rallié le Sénégal à la voile depuis la Bretagne, via Madère et les Canaries, en 1985.

Voilà, c'est parti. Je ne sais pas où cela mènera. Je suis une fois encore sur une corde raide, tendue entre deux mondes. Je suis une fois encore avec ce sentiment d'exaltation et de vertige. Rien n'est parfait, rien n'est à mon goût. Et pourtant je suis une fois de plus grisé par la re-lecture de mes récits. Je sais pouquoi j'écris. C'est énorme. Cela devrait suffire à me convaincre de la pertinence de mon action. Mais je doute encore. Je douterai toujours. Je dois l'accepter.

J'écris en premier lieu pour que mes proches, mes amis, ceux d'ici et d'ailleurs, puissent découvrir plus en profondeur les méandres de ma vie, de mon cerveau d'autiste, et que vous puissiez en tirer du courage, de la joie malgré les pressions extrèmes que nous traversons tous à un moment où à un autre.

Je veux profiter du moment pour vous remercier, vous tous qui m'avez suivi, aidé, encouragé. Vos élans virtuels se sont systématiquement transformés en aide réelle pour moi, au cours de ces années que nous avons partagé. Ma gratitude est inexprimable.

En 2006, quand j'ai ouvert ce blog, j'étais à la rue. L'écriture a été un point de repère pour moi. Une façon de partager aussi. J'ai alterné les périodes positives avec les descentes aux enfers. Pas d'alcool (pas en excès en tout cas), pas de drogue. Juste une prison dont j'étais le seul à voir les barreaux dans toute leur complexité, sans être capable de les matérialiser pour le monde qui m'entoure. Je vivais en permanence dans un monde que personne ne pouvait comprendre ou partager.

Il a fallu ce diagnostique d'autiste de haut niveau pour que je parvienne à expliquer, à montrer, à comprendre aussi.

J'ai retrouvé pied en m'exilant à nouveau, en me mettant en situation de danger, en m'imergeant dans un contexte nouveau et inconnu, sans filet, comme toujours!

La semaine prochaine seront publiées mes premiers textes dans la revue "Nouveaux delits"

http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/

Ce sont des textes inédits que m'a commandé l'éditrice Cathy Garcia, après avoir découvert mon blog. Je lui ai laissé carte blanche pour la sélection, l'illustration, la mise en page. Je n'ai pas vu encore le résultat...

Vous pouvez aller consulter son site... ses sites même. Je vais les mettre en lien également. Vous pouvez la contacter pour commander un exemplaire de la dernière revue, le numéro 48, où vous retrouverez mes textes. Elle fait un travail exceptionnel pour parvenir à publier cette revue quatre fois par an depuis des années, pour partager sa passion de la poésie et des arts.

Par ailleurs, je prépare la publication de mes trois premiers livres. Le premier sera publié dans les prochaines semaines. Je vous tiendrai au courant.

Je remets aussi en ligne mes sites internet, fermés depuis mon divorce.

www.sylvere.com

www.realfreeworld.com

Tout est encore en chantier, vous devrez patienter encore un peu avant de pouvoir profiter pleinement de ce monde...

Dans ma traversée du Canada, autant que j'ai pu sans faire sortir mon amie de ses gonds, je faisais tourner et re-tourner cette chanson;

 

 

Cette musique est maintenant et de façon indélébile associée à ces images de paysages incroyables que j'ai traversé pendant un peu plus de quarante neuf heures de route hivernale entre Montréal et Edmonton.

Et aussi celle-là;

Et d'autres versions... je ne sais pas choisir laquelle domine!

https://www.youtube.com/watch?v=azV0Y7v6wsg

https://www.youtube.com/watch?v=ynoc_vz_-lY

09/03/2014

Les surprises de la vie... de Prince!

Régulièrement, mon amie me fait remarquer à quel point ma vie et mes histoires sont invraissemblables. Elle ajoute régulièrement que sa propre vie est déjà tellement invraissemblable que de m'entendre raconter mes histoires la rend perplexe de temps en temps. Nous avons passé plus de 70 heures consécutives ensemble et nous arrivons à destination.

La situation est étrange. Je suis venu en Alberta une fois, dans les premières années de ma vie Canadienne. J'étais venu en avion, pour le travail, mais avais profité de l'occasion et du budget dédié de mon employeur. J'ai découvert le sud de la province, les montagnes Rocheuses, le lac Louise et la station de Banff, et avais dormi dans le fameux Chateau Lake Louise, un des hotels du Canadien Pacifique de renomée mondiale, construit à l'époque où le chemin de fer reliant la côte ouest (Pacifique) du Canada à Montréal était le seul moyen pratique de se rendre dans les provinces du centre et de l'ouest du Canada. Le trajet était jalonnné de quelques-uns des plus beaux hôtels au Canada, construits par le Canadien Pacifique (société de chemin de fer de l'ouest canadien) pour sa clientèle huppée, dont le chateau Frontenac à Québec, et le Royal York à Toronto (où j'ai également dormi).

Mes premières impressions sont curieuses. Je suis bien au Canada, avec ses spécificités indiscutables. Mais l'esprit est beaucoup plus "pionnier", les espaces immenses et moins peuplés, moins pollués malgré la sombre tâche des sables bitumineux. La culture est imprégnée du "big brother" voisin, plus profondément qu'au Québec, bien sûr, à cause de la langue.

Mon amie, après quelques jours à travailler durement comme "labourer", trouve un contrat dans un "camp" sur un "oil patch". Le salaire, pour une personne non qualifiée, est élevé; 20$ de l'heure (13€), temps double après 44h, 3 semaines de travail ininterrompu, 7 jours sur 7, 11 heures par jour, suivi d'une semaine de congé. Les "oil patch" sont éloignés de tout et des camps d'hébergements sont construits sur place pour loger employés et personnel de soutien.

J'ai trouvé une sous-location à Edmonton, juste avant son départ. Je suis maintenant confortablement installé, avec la télé cablée, pour un mois. Je ne sais pas si c'est la taille de l'écran ou l'immersion dans la culture purement anglophone nord-américaine, mais les présentateurs, les gens, le public, me paraissent plus proches. Plus proche que la France et sa culture dans laquelle je suis né et j'ai grandi, dont je reçois des programmes via TV5 monde. Il est vrai que j'ai maintenant passé plus de temps en Amérique du Nord qu'en France.

  Premier soir où je regarde la télé, je zappe et tombe sur le "Arsenio Hall show" sur une chaîne américaine  et qui vois-je, assis sur la chaise d'invité? Prince!

Welcome to the western end of Canada!

25/12/2013

Soyez prudent et bonne fin d'année!

Pour moi, c'est la meilleure vidéo de l'année... tellement que je vais la sous-titrer en anglais et la balancer sur mes réseaux américains.

Elle devrait réellement être intégrée dans la formation des nouveaux conducteurs, juste pour qu'ils comprennent! (Quoique je connais des conducteurs de longue date qui... mais bon... :-(  )

Et bien sûr...depuis si longtemps...et cela reste d'actualité!

20/12/2013

La tête dans les nuages...

Je savais que les paradoxes me guettaient. Supporter sans trop de mal -21°C et...

Je m'installe dans la gare centrale pour prendre mon petit déjeuner. Je me dévêtit pour ne pas me mettre à transpirer. La transpiration est mon pire ennemi, car elle refroidit rapidement et me congèle.

Mais je ne prête pas attention aux courants d'air glacials qui arrivent directement sur moi à chaque arrivée de train, quand les portes de la gare s'ouvrent pour laisser entrer les passagers. À quelques reprises, j'ai bien une petite réaction, mais après de telles nuits, cela ne s'imprime pas dans mon cerveau.

Absorbé par mille choses, les heures passent jusqu'à ce que je sente brutalement mes poumons comme saisis dans un étau. Je me mets à tousser. Je pense immédiatement à la pneumonie. Ma température a monté brutalement, et mon souffle est brulant. Un mal de tête terrible m'assaille. J'ai envie de vomir. J'essaie de reprendre mon souffle, de calmer ma respiration malgré les quintes de toux répétitives. Je parviens à relaxer. Je bois de l'eau, petit à petit. J'ai conscience aussi de m'être déshydraté.

Je me rhabille juste ce qu'il faut, et entoure mon cou d'une écharpe synthétique très chaude. Quand je sors dehors, je mets mon écharpe devant mon nez et ma bouche, et j'enfile ma cagoule par dessus. Je ne découvre ma bouche et mon nez que lorsque je suis à l'interieur d'un lieu bien chauffé. J'ai l'air d'un bandit, ainsi accoutré dans les couloirs du métro ou des centres commerciaux du centre-ville, mais tant pis!

J'ai trouvé des pamplemousses à rabais, j'en mange deux. Je prends également 1000mg de vitamines C en comprimés et je croque une pomme. Je bois du jus régulièrement pour essayer de convenablement me réhydrater. Le soir, je suis encore brulant, mais je parviens à prendre des petites respirations sans tousser.

Le lendemain, je n'irais pas jusqu'à dire que tout à disparu. Je tousse encore un peu, mais je prends des inspirations profondes sans déclancher ces quintes de toux violentes d'hier. À peine quelques toussotements. Manger beaucoup, boire beaucoup...j'ai déjà presque vaincu!

15/12/2013

Les chiffres...

La météo l'annonçait... grands froids, puis tempête de neige...

Je m'y étais préparé. J'avais enregistré dans ma tête quoi manger, organisé mon petit local de stockage, accessible seulement le jour, pour que ce soit facile et rapide de prendre une quantité suffisante de calories en boite ou en sachet, pour faire face à n'importe quoi, sans avoir à chercher, sans avoir à réflechir, rapidement.

Bon, j'ai également des options, en cas d'urgence extrème... Bien sûr, certains diront que je suis déjà en situation d'urgence extrème!

Alors, ce soir-là, alors que le thermomètre tournait déjà autour de moins dix-huit, j'étais serein, prêt à faire face à la musique.

Je me suis habillé; Un t-shirt en coton, un sweater en coton léger, un gilet de laine assez mince, un chandail en polaire, et un blouson imperméable technique. Une paire de caleçons longs, une paire de jeans, et une paire de chaussettes de sport de coton, le point faible de ma tenue. Et une paire de chaussures de sport d'été, en toile aérée, très pratiques l'été car on ne transpire pas dedans... :-D

(Non, je ne suis pas maso, je n'ai juste pas eu la possibilité de retrouver à temps une paire de chaussure adéquate!)

J'ai pris un thermomètre électronique pour pouvoir contrôler visuellement les changements de température et ne pas me laisser surprendre pendant la nuit. C'est un thermomètre que j'avais acheté il y a trois ans pour documenter mes travaux sur des modèles éco-énergétiques. Il va trouver une nouvelle utilité pour quantifier les énergies et les températures dans une nuit de sdf...

Depuis trois semaines, j'avais mis de côté l'argent pour me payer ce petit resto qui fait un si bon steak-frites, pour moins de quinze dollars. J'avais pris des calories supplémentaires en barres de céréales ensachées individuellement. Pas écologique, mais dans les circonstances... Comme le restaurant offrait une promotion - le même steak-frites en "menu du jour", avec soupe aux pois en entrée, dessert et café - je n'ai rien pris de plus. J'ai mangé le petit pot de sauce brune bien grasse au complet. J'ai compris la semaine passée pourquoi les gens pauvres sont en si mauvaise santé! Alors que moi, je compte les calories pour en ingurgiter plus, eux en ingurgitent trop et devraient compter pour les réduire! Quel ineptie! La pauvreté peut aussi se mesurer à l'excès de calories ingurgitées quotidiennement!

Vous avez bien mérité une petite photo...

En la regardant d'ailleurs, je m'aperçois que j'ai oublié de mentioner dans la description de mon habillement une cagoule technique synthétique, très efficace parce que l'humidité de la condensation de ma respiration ne gèle pas à l'interieur. Elle coupe relativement bien le vent. Par contre, elle n'est pas chaude du tout. J'ai mis un bonnet en polaire par dessus, et emmené une deuxième cagoule en polaire également, qui a un long tube protège-cou. Je n'aurai pas besoin de la mettre cette nuit. J'ai aussi la capuche de mon blouson imperméable qui peut faire une couche supplémentaire au besoin. Et j'ai une mauvaise paire de gants synthétiques. Il faut que je revois cet aspect crucial de ma protection nocturne.

sdf,sans-abris,itinérant, Montréal,Quebec,Canada

Qaund j'ai quitté le restaurant, vers 23 heures, j'étais parfaitement bien, totalement prêt, la respiration contrôlée, le souffle maîtrisé, même pas coupé lorsque, refermant la porte du restaurant derrière moi, j'ai reçu la grande claque de mère-nature au visage.

Je me suis dirigé rapidement vers mon lieu de nuit. Un changement d'environnement imprévu m'en interdit l'accès. J'évalue les options, heureusement déjà mémorisées. Je ne dois surtout pas perdre de temps, ne pas perdre ma chaleur avant d'être installé pour la nuit. Je choisis celle qui me convient le mieux dans le contexte. Derrière un talus, le long d'une palissade de chantier. J'installe mon couchage. Je n'arrive pas à trouver la paire de chaussettes supplémentaire en laine que je comptais enfiler par dessus celles de coton en me couchant. Je m'apercevrai le lendemain que j'avais eu la brillante idée d'en entourer ma bouteille de tisane chaude dans son sac thermique, en me disant que j'aurais ainsi le super confort d'enfiler une paire de chaussettes chaudes en me couchant! Mais le moment venu, je ne me souvenais que de l'emplacement initial, où elles ne se trouvaient plus bien entendu!

J'étale un vieux rideau de douche pour couper la migration de l'humidité, je pose dessus deux écrans en mousse fine aluminisée, du style que l'on mets sur le pare-brise des autos, à l'interieur, l'été, pour réduire la chaleur du soleil. La face aluminisée est tournée vers le dessus, pour réfléchir la chaleur de mon corps vers lui-même. J'ai acheté ces écrans il y a quelques mois, dans un magasin "tout à 1$".

Je me glisse dans mon sac de couchage. Le choc thermique est raisonnable. Ma respiration toujours calme. Mon médecin, rencontré plus tôt cette semaine, a vérifié mon rythme cardiaque. 88 battements par minute. C'est nettement plus qu'ordinairement. Mais cela me permet d'avoir une meilleure circulation sanguine, ce qui est parfaitement adapté à la situation.

Je dois couvrir la moindre partie de mon corps, car exposée, la peau gélerait tres rapidement à cause du vent. Le facteur éolien a fait descendre la température à -37°C ressentis sur la peau. Je mets une petite couverture pliée plusieurs fois sur mon visage, la seule partie exposée dans mon sac de couchage momie, en ménageant une petite poche d'air pour pouvoir respirer. Plusieurs fois dans la nuit, la couverture glissera et le froid me réveillera presqu'aussitôt, me commandant de la replacer.

Ma nuit sera entrecoupée de réveils, plus par crainte que par problème réel lié au froid. Je ne me suis pas refroidi. Le matin (5 heures...), mes pieds étaient encore chaud malgré leur peu de protection. Je m'apercevrai plus tard que l'heure affichée sur mon appareil, ironiquement, est toujours l'heure d'été...

Sortir du sac de couchage fut dur. J'ai pris quelques minutes pour prendre des photos, relever la température. Après deux minutes à tenir la sonde du thermomètre électronique, sa descente ralenti mais je ne peux plus la tenir car mes mains commencent à geler. Il indique moins dix-huit virgule cinq degés Celsius (Centigrades). Je remballe tout et colle mes mains à mon entre-jambe, toujours l'endroit le plus chaud de mon corps! :-D

sdf,sans-abris,itinérant, Montréal,Quebec,Canada

En arrivant à l'abri, dans le métro, je constaterai que la température était de moins vingt et un degrés Celsius (Centigrades).

Avec le "facteur vent", ma peau exposée ressentait moins trente-sept! Ma nuit la plus froide jamais passée dehors!

J'ai l'impression qu'on est en train de me dégeler les mains à coup de marteau. Mes gants ne sont pas à la hauteur du défi!

Mais en quelques minutes, tout retourne à la normale. Je me sens toujours "de luxe" au vu des ressources que je continue de puiser en moi!

26/10/2013

Un autre monde...

Après être sorti du cabinet de mon médecni traitant, je réfléchi a ce qui vient de ce passer. À un moment, elle me demande: "Est-ce que vous pensez à retravailler?"

Sans hésiter, je réponds: "Avec 6 semaines de cheminement avec l'équipe d'intervention pour me "reparamétrer", et 6 semaines de plus pour reprendre possession de mesmoyens, dans trois mois, je retravaille."

S'en suit une petite discussion sur le travail à plein temps, ou pas...

Mais en prononçant ces mots, je prends la mesure du décalage avec ma réalité. Je prends la mesure du gouffre qui s'est creusé avec ces deux derniers séjours prolongés dans la rue.

J'y repense tout le reste de la journée. Je regarde dans le rétro-voyeur. Et je réalise que depuis que j'ai commencé à travailler, je n'ai jamais travaillé plus de dix heures par semaine. J'entends par là travailler dans le sens neurotypique du terme. Style ce que quelqu'un de "normal" jugerait si il pouvait m'observer dans mon travail à l'année longue.

Je n'ai jamais gardé un emploi plus de 10 semaines. S'en est toujours suivi une longue période de récupération, pour ne jamais dépasser trois mois par an de travail effectif. Sauf à trois reprises, comme directeur de recherche. En recherche, on me demandait des résultats, on l'évaluait aux trois mois, aux six mois, et on jugeait sur la vente de mes travaux, dont j'assurais la première phase de commercialisation. Et comme j'étais en succès dans toutes les phases, comme les chercheurs que je dirigeais étaient non seulement bien encadrés, mais en plus très satisfaits de travailler avec moi, je pouvais suivre mon rythme. Mon rythme; 2 heures de travail effectif par jour sur mon programme de recherche, y compris l'interaction avec les chercheurs et mon administration. Le reste si dispersant dans diverses tâches reliées plus ou moins lointainement, voire pas du tout, au projets que je dirigeais. Cela me permettait une efficacité hors du commun, les solutions, les directions que je trouvais étaient toujours issues d'une vision élargie, ouverte sur d'autres mondes, me permettant de solutionner des problématiques en m'inspirant d'autres sphères de la science. Je passais des heures chaque jour à fouiller, compulser des rapports de recherche, comprendre l'origine de découvertes, d'innovations, permettant à mon cerveau de s'alimenter d'une somme phénoménale de paramètres. Mais globalement, je ne passais en moyenne que deux heures par jour à travailler effectivement sur mes projets de recherche.

Mon entourage m'a souvent appellé "l'encyclopédie". Face à un problème hors de mon champs naturel de compétence, je demande invariablement au chercheur: "explique moi ta problématique, depuis sa source". Avec quelques notes, je fouille son contexte, me crée une structure de référence, et après quelques heures, j'ai une vision complètement différente, dénuée des freins que représentent souvent les structures d'apprentissage académiques.

Les tests ont montré que je me situe dans les 3 pour cents des cerveaux les plus aptes à résoudre des problèmes complexes en dehors du language et de l'acquis. Lors de mes évaluations, c'est l'extraordinaire capacité de créer des outils, de modéliser les savoirs pour faire complètement disparaître de la vue mes handicaps, qui a interloqué mes interlocuteurs. Il en devenait impensable que je fus incapable d'accomplir des tâches simples, d'adopter des fonctionnements de base dans les interactions professionnelles, sociales, interpersonnelles...

que faire, maintenant, aujourd'hui ou demain pour retrouver cette capacité de fonctionnement de haut niveau?

Premièrement, accepter que je ne fonctionne plus du tout actuellement. Enfin...presque!

Accepter que je suis handicapé et que jamais je n'ai pu (donc, fort probablement, jamais je ne pourrais!) fonctionner "normalement". Il faut que je retrouve et que j'adapte mes outils à mon nouveau contexte, que je reconstruise un référentiel plus exact, plus approprié à ma situation réelle, et que je me recrée un contexte où je pourrai intégrer à nouveau une aide extérieure me permettant de palier à mes handicaps! Et là, seulement, je recommencerai à performer suffisament pour retrouver une vie vivable.

L'hiver est là, tirant ses coups de semonce prévenant de son déchaînement prochain. J'ai préparé tant bien que mal une possibilité de passer mon hiver dans la rue. Mais je rêve encore d'autres avenues...

Et je retrouve, grâce à un ami, une vibration incendiaire qui jadis, me fis dresser les poils sur tout le corps:

La version originale, chantée par son compositeur, Jorge Ben Jor

Puis celle de Sergio Mendes, que l'on entends presque systématiquement quand on montre des images du Brésil, que ce soit à la télé ou dans des films...

Une version "trend" de Nossa...

Et une version non moins "trend" avec Black Eyed Peas"

J'aime les quatre. Je les écoutes une à la suite de l'autre, mais celle qui me donne toujours le frisson est l'originale!

Et vous, laquelle préféerez-vous?

23/10/2013

Trusty Tahr; La prochaine LTS de Ubuntu à venir en Avril 2014

Et nous y voilà... enfin presque! La dernière version d'Ubuntu vient à peine de sortir; 13.10 "Saucy Salamender", que je ne vois que la prochaine; 14.04 "Trusty Tahr". J'ai upgradé à 13.04 en Avril, pour des raisons de formats vidéos que j'avais de la difficulté à stabiliser avec 12.04. La version à venir en Avril 2014 sera la première à intégrer la version pour tablettes et smartphones avec celle pour ordinateurs. Elle devrait également permettre de continuer à faire tourner Androïd au besoin, ce qui permettra de conserver nos applications Androïd favorites. Cela ouvre de toutes nouvelles dimensions en informatique. J'attends cela depuis longtemps... Cela va pemettre par exemple de faire des saisies de données avec un smartphone directement dans les logiciels de gestion, de comptabilité, de bureautique, et ce, à coût très réduit. C'est une solution idéale pour les PME en butte à une mise à niveau indispensable pour celles qui utilisent Windows XP, dont Microsoft abandonne le soutient début 2014.

Par ailleurs, le projet Fairphone avance bon train. J'ai eu quelques inqiuétudes par moment, devant l'ampleur du défi et les obstacles qui se dressent inévitablement en cours de route.

Un petit extrait de commentaire de l'équipe illustre bien les pièges à éviter. Je suis moi-même promoteur de cette vision.

"It's quite a good example of the Catch-22 we sometimes face - we can't be paralyzed by the fact that this phone is not 100% fair. We have to start somewhere! And only by actively participating and making this phone, do we figure out the complexity of the industry, so we can work towards making it a bit better one step at a time."


Les extrémistes de tous genres sont les freins de l'évolution positive d'une problématique. Faire au mieux avec les moyens dont on dispode sur le moment pour faire avancer une problématique ne serait-ce que d'un pouce en vaut toujours la peine. Ça évite au moins de ne pas reculer!

07/10/2013

Le soleil...

Je suis à l'aéroport. Je me suis fait un petit bagage comme si j'allais partir loin. Avec l'automne, la pluie, le froid qui m'a transpercé toute la nuit, l'envie est furieuse. Quand le vent se mèle à la pluie, l'humidité rentre partout, suivant les courants d'air qui s'infiltrent dans mon couchage. Il va falloir que je revois sa composition et sa mise en oeuvre, car la nuit n'était pas si froide encore. Loin des moins quinze degrés par lesquels j'ai déjà passé une nuit dehors, il y a quelques temps!

Le soleil est revenu, mais les gens ont déjà sorti leurs manteaux d'hiver. J'ai acheté cet été en solde une veste imperméable. Le genre de vêtements que je n'aurais jamais les moyens de m'acheter en temps normal, mais sur lequel j'ai mis la main à prix très réduit. Il n'est pas super beau (couleur vert kaki, j'ai l'air d'un soldat qui part au combat!), mais c'est un tissus technique, imperméable et laissant circuler l'air, donc relativement confortable, ne condensant pas l'humidité.

Avec un pull et une polaire en dessous, je pourrai affronter le froid de l'hiver qui approche.

Je passe d'un comptoir à l'autre, en regardant les destinations et en me projettant dans une nouvelle aventure. Peut-être vais-je trouver un billet de dernière minute vers le sud dans mes maigres moyens. Après, dormir dehors au soleil ne me pose pas de problème!

Je suis devant un guichet en train de chercher la destination d'un prochain vol quand une très jolie fille m'interpelle;

"Oh, tu vas aux Bahamas toi aussi?"

Je la regarde, fouille ma mémoire, mais ne la reconnais pas. Elle me fait bien vaguement penser à une fille croisée dans une soirée chez des amis, il y a quelques temps, mais le match de mon souvenir et de son visage ne se fait pas...

Elle me prends par le bras d'un geste très tendre qui me surprend, et me dis: "Le vol part dans vingt minutes, il faut faire vite!"

Elle ajoute avec un petit sourire entendu:"C'est cool que tu viennes, Ça va être bien!"

Je suis interloqué. Je la suis dans la file et la laisse passer à l'enregistrement. Je me dirige vers le préposé quand elle a fini et lui demande si il reste de la place dans l'avion. Il me répond par l'affirmative et me dit de faire vite et de me rendre au comptoir de vente des billets en m'indiquant d'un geste de la tête un corridor. Je fonce!

Bahamas,voile,plage

Je me projette instantanément dans tous mes souvenirs avec mon fils en voilier dans ces îles, il y a bien des années maintenant!

Et j'essaie tout en courant vers l'endroit indiqué de replacer le contexte dans lequel j'ai pu rencontrer cette fille.

Je me perds dans le dédale de corridors. Je demande à un employé de service mon chemin. Il m'explique. Je me retourne pour prendre mes bagages et m'aperçois qu'on m'a volé mon sac de couchage. Je n'en reviens pas. (Au Canada, c'est vraiment rarrissime de se faire voler des baggages!). Bon, ce n'est pas grave, me dis-je. Je l'avais payé cinq dollars en solde... je n'en mourrai pas!

Je reprends ma course en direction du comptoir de vente. Je regarde ma montre. Ça va être juste! J'entends un appel aux hauts parleurs à mon intention. L'employé a eu la gentillesse de prévenir les préposés à l'embarquement de ma venue. Je suis touché!

Mais tout à coup, mes jambes refusent d'avancer. Comme dans un mauvais rêve, malgré tous mes efforts, je parviens à peine à mettre un pied devant l'autre au ralenti.

Un déclic se fait dans mon cerveau. Je me réveille, transpercé par les courants d'air de la nuit froide et humide!!

Et oui, même dans la rue, dans le froid, les sdf rêvent eux aussi parfois!

(C'est le récit de la nuit qui vient de passer. J'ai très mal dormi. Mais je ne peux m'empêcher de rire en vous racontant cela.

La radio du restaurant près duquel je suis assis joue "YMCA" de Village People. Il faut que je me sorte de cette situation qui devient innextricable une fois encore!)

25/09/2013

Le Canada

En quelques images amusantes...

http://themetapicture.com/things-are-somehow-different-in...

24/09/2013

Illustration

Aujourd'hui, je me log sur un serveur informatique. Je tape une des commandes que j'utilise le plus. L'ordinateur me fait remarquer que ma commande est erronée. Je ressors mes notes pour vérifier. Je lis la commande, la retape. Cette fois-ci elle passe. Mais tout à coup, je note un détail; la commande telle qu'elle est écrite dans mes notes a une faute. Une petite lettre manquante.

Pourtant, je l'ai lu des dizaines de fois, tapée des centaines de fois depuis 3 ou 4 ans, sans jamais remarquer la faute à l'écriture, mon cerveau auto-corrigeant sans que je m'en aperçoive.

Déficité sévère de l'attention plus syndrome d'Asperger...

Là, c'est bénin.

19/09/2013

Le premier jour...

de ma vie officielle d'autiste! Ce sera pour moi comme une deuxième naissance. Personne ne peut imaginer ce que cela fait!

Après avoir délibéré à huis-clos quelques minutes, à la suite d'une heure quinze minutes d'évaluation, les deux psychiatres me rappellent. Ils n'ont eu aucune hésitation.

"Vous êtes sur le spectre autistique... mais... vous n'êtes pas dans les livres. Vous êtes un hybride! Un hybride de syndrome d'Asperger aigu et vous présentez également l'évidence des troubles envahissants du développement de l'autisme-type!"

Je pouvais bien être hors norme... la vie ne m'avais laissé aucune chance de m'en sortir sans domages collatéraux, dès le départ.

Des années de lutte, seul avec ma tête. Quatre ans après mon premier auto-diagnostique assez formel, quatre ans à me battre pour faire comprendre, pour dire aux professionnels, psychiatres y compris; "mais si, je vous dit, il faut regarder de ce côté". Et chaque fois, des sourires entendu, des "non, vous savez..."

Et en une heure quinze minutes, les deux psychiatres n'ont eu aucune hésitation.. Aucune hésitation non plus pour me sortir des registres, des normes établies,  pour me dire qu'ils étaient impressionnés par les outils que j'ai développé pour faire disparaître de la vue mes handicaps. Une force et un handicap, ont-ils précisé. Une force au regard des incroyables accomplissements de ma vie. Un handicap parce que je suis toujours passé, selon leur expression, "en dessous des radars", et que j'en ai payé le prix.

Voilà... personne ne peut imaginer ce que cela me fait... personne ne peut imaginer ce que signifient ces quasi-larmes de libération, de pouvoir se dire "non, je n'étais pas fou!" Je suis autiste et Aspie. Je n'avais jamais osé le formuler parce que ça n'existe pas dans les manuels. Parce que cela sort des cadres et des conventions. Seuls des psychiatres avaient le pouvoir de le faire.

Ma vie retrouve tout son sens. Je me sens renaître. Oui, je me sens au premier jour d'une nouvelle vie.

Je n'oublie rien de l'ancienne. Je n'oublie aucun de vos commentaires, qui m'ont permis d'exister quand je doutais de tout. Je n'oublie aucun de vos gestes. Je n'oublierai jamais ma lectrice, qui, en apprenant ici la perte de mon lecteur MP3, m'a envoyé immédiatement de quoi m'en acheter un autre. Jamais plus de ma vie je n'écouterai de la musique sans penser à elle, que je ne connais qu'au travers de quelques commentaires, quelques échanges de courriels. Merci infiniment de ce coeur et de cette humanité!

27/04/2013

Et voilà...

Migration effectuée, zéro dossier perdu ou égaré, mes archives photo, vidéo, travail... tout retrouve une place commune sur mon ordinateur portable.

Récupérés aussi mes marque-pages, mes barres d'outil... tout se fait plutôt fluidement. Ubuntu 13.04 tient ses promesses.

Cette fois-ci, je me fais un script au fur et à mesure du remontage, pour tout réinstaller sans manipulation ou presque, la prochaine fois. De cette façon, que ce soit un changement de disque dur, d'ordinateur... je retrouverai à chaque fois la même configuration.

Je suis très satisfait de mon boulot!

25/04/2013

Geek time

Il est rare que j'attende un produit technologique avec impatience. Probablement parce que je n'ai pas de budget pour acheter... Quoique... même quand j'ai les moyens d'acheter du neuf, dernier cri, j'attends que le prix du produit chute. Je ne suis jamais pressé. Cela permet aussi que le produit passe l'épreuve du temps, même si aujourd'hui, l'échelle temps n'a plus beaucoup de sens. Le produit devient obsolète quelques semaines, quelques mois tout au plus après sa sortie!

Par contre, dans le domaine de l'open source, je suis en veille permanente. Quatre ans que je travaille exclusivement avec Linux. J'étais perplexe quand Ubuntu a changé son interface graphique pour intruduire Unity. Je suis devenu frustré, comme beaucoup, devant la quantité de bugs à sa sortie. Je ne suis ni résistant au changement, ni prêt à l'adopter aveuglément. Je calcule tout soigneusement quand il s'agit de technologie. Alors, j'ai changé de mouture Linux, passant de Ubuntu à Mint. Je me suis adouci quand Mark Shuttleworth, CEO de Canonical (la société derrière Ubuntu) a expliqué son objectif. J'étais dubitatif. Cela semblait un bel objectif en théorie, mais le chemin me parraissait ardu, voir irréaliste. Je voyais également le potentiel incroyable. Je voyais ce qui ferait mon bonheur technologique; le même OS sur mon smartphone, mon lecteur MP3, ma tablette et mon ordinateur.

Alors, j'ai commencé à piocher pour installer l'engin dans ma machine. J'ai collaboré pour la première fois à la résolution de bugs. Et je dois avouer que plus ça avance, plus les résultats sont enthousismants.

Cela ouvrira la possibilité d'utiliser les mêmes logiciels, donc de travailler indiférement sur n'importe lequel de mes appareils, donc de travailler de n'importe où, à n'importe quel moment. Avec mes sauvegardes automatiques, je ne risque plus de perdre quoi que ce soit. Cela m'est surtout utile lorsque je suis dans la rue. Il m'est parfois impossible de transporter mon ordinateur portable, alors, avancer indiférement sur mon smartphone ou ma tablette serait top!

Pour l'instant, je dois me contenter d'une gymnastique compliquée et pas très efficace. Donc je suis limité... mais on s'approche tranquilement du but! Tout est cependant déjà en place pour répondre à ma mobilité. J'ai un espace de sauvegarde conséquent sur mon cloud, en plus de mes outils habituels, et mes sauvegardes sont automatisées, même quand je suis loin de Montréal. Mon travail est devenu plus fluide!

Demain, le 25 Avril, sort la version 13.04 de Ubuntu. J'en profite pour changer le disque dur de mon ordinateur portable pour un plus gros (750 gig ultra rapide), que j'ai récupéré à bon marché juste avant de partir, et qui va me permettre notament de traîner mes archives vidéos et faire du montage "sur la route".

L'intégration complète ordi/tablette/smartphone est prévue pour la fin de l'année, alors que l'échéance initiale était 2014. Je suis bien content de ce devancement de l'agenda! Je commence à m'y voir, "just in time", cet automne, avec ce qui pourrait être un timing parfait. Après tant de galères, peut-être enfin l'éclaircie dans mon ciel nuageux, avec la possibilité de travailler à chaque fois que je suis en mesure de le faire...Donc une possibilité de booster ma productivité et tirer le potentiel de mes rythmes autistes.

 

18/04/2013

Christophe Colomb...

À chaque nouvelle navigation, dans chaque nouvelle situation difficile, je me compare à Christophe Colomb. Bon, c'est vrai, à son époque, les mers n'étaient pas sillonnées de navires gigantesques, aveugles et sourds à la présence de ces bateaux insignifiants que sont les petits voiliers sur lesquels je navigue. Mais, d'un autre côté, j'ai une connaissance phénoménale de la mer, du monde, des étoiles. J'ai des instruments de navigation, des données, dont il ne pouvait même pas imaginer dans ses rêves les plus fous qu'ils puissent exister un jour.

C'est vrai aussi que quand j'ai commencé à naviguer, je considérais hasardeux des choses que je fais aujourd'hui naturellement. Je vais faire bondir bien des marins en montrant de quelle façon j'ai abordé cette traversée. Aucune carte marine après la sortie de la baie de Cheseapeake. Comme seuls instruments de navigation, quelques notes, quelques points de repères griffonnés dans mon agenda, une petite tablette Samsung avec un GPS, payée 150$ (115€), une boussole et une montre de précision, au cas où...

 

navigation hauturiere,traversee,voile

Oui, je sais... c'est un peu ouf mon truc!

Peu de gens seraient capable de faire route avec si peu. Mais j'ai une quantité astronomique de données emmagasinées dans mon cerveau pour compenser, et une évaluation "raisonnable" de la faisabilité de mes aventures.

Mais cela fait aussi partie du plaisir de naviguer que partir à l'aventure, sans chemin trop balisé!

Et à chaque fois que je me disais que j'étais un peu barjot de naviguer ainsi, je me rassurais sur ma santé mentale en me disant que les limites étaient faîtes pour être repoussées. Sinon, Christophe Colomb n'aurait jamais "découvert" l'Amérique. Et je suis bien mieux équipé que lui pour me rendre sur n'importe quel coin de la planète!

Mais chaque matin, quand le jour se levait, je me sentais comme cet homme qui, tombant du vingtième étage d'un immeuble passe devant le dix-neuvième et se dit "jusqu'ici, tout va bien!". Et invariablement, j'explosais de rire en repensant à cette histoire...

Alors, quand, après 30 jours de naviguation (je viens de compter, pour la première fois, le détail des jours navigués, car une des rares choses que je m'impose en navigation, c'est de tenir un livre de bord, à peu près légal, à peu près tous les jours...), je me suis glissé dans la baie de Marigot, mes voiles déchirées, luttant au milieu de la nuit de peine et de misère. J'ai tenté désespérément de remonter au vent un tant soit peu en louvoyant entre les yachts au mouillage pour m'abriter et m'ancrer raisonnablement. Je me suis finalement effondré sur ma couchette en me disant qu'enfin, je pouvais m'endormir sans crainte. J'ai sourit aux anges qui m'avaient peut-être accompagnés et me suis endormi aussitôt du sommeil du juste. Contrairement à ce que je m'imaginais, je me suis réveillé frais et dispo vers 7 heures du matin. Même pas faim, malgré 9 jours de jeun complet, 29 jours de sous-alimentation, sans parler des semaines précédentes, des mois précédents...

St Martin,St Marteen,Antilles,Caribbean

Second repas à terre; je commence par le fromage!!!

Et j'ai attendu midi passé avant d'aller à terre prendre mon premier repas, dégustant chaque seconde du bonheur de la libération de l'étreinte puissante, mais aussi parfois étouffante, parfois mortelle de la mer. Et déjà dans mes veines le besoin de ce savant mélange d'endorphines générées par son bercement, d'adrénaline, et de tout ce que la mer donne généreusement par sa puissance, son gigantisme infini, sa beauté incomparable... Et ce sentiment d'être quelque part un membre de cette caste à part de ceux qui ne sont ni morts, ni vivants, en suspend au milieu des mers et des océans, en attendant l'atterrissage!

10/04/2013

Dien Bien Phu

Passer quelques heures avec un grand-oncle qui était en Indochine, médecin militaire, lors de la bataille de Dien Bien Phu...

C'est un peu comme entrer dans l'histoire de Forest Gump, mais une guerre plus tôt! Surréaliste!!!

L'entendre me remercier d'avoir partagé avec lui mes recherches historico-généalogiques martiniquaises... c'est la cerise sur le sundae!

03/04/2013

Les heures, les jours...

Je tente toutes les options, pour finir à sec de toile. Le vent a grimpé à 60 noeuds dans les raffales et plus rien ne tient. J'attache la barre et je vais prendre quelques minutes de repos. Les déferlantes passent régulièrement par dessus le roof pour innonder le cockpit. Mon inquiétude; le plancher du cockpit qui est endommagé et que je n'ai pu réparer avant mon départ. L'eau rentre, mais "pas trop".

Je dérive, mais n'ai aucune idée de la vitesse et du cap de cette dérive. Le bateau est secoué dans tous les sens, les vagues heurtent le bateau dans un fracas assourdissant. Cette tempête durera plus de trente heures. J'arriverai à voler quelques heures de sommeil, malgré le bruit, l'incertitude, et la circulation maritime toujours intense. Vers minuit, le troisième jour, le vent faibli suffisamment pour que je puisse remettre de la toile. Le bateau repart. Je prends du repos par tranches de quinze minutes, tantôt accroché à la barre, tantôt en l'ammarrant et en me couchant dans le carré. La fatigue permanente commence à prendre ses quartiers.

P1010293.JPG

Je regarde avec émerveillement le soleil se lever, encore. Jamais je ne me lasserai. Je ne fais rien d'autre que barrer, grignoter trois fois par jour, me reposer au gré de ce que la mer veut bien m'octroyer.

24/03/2013

Adrénaline!

Aussitôt le cargo passé, je vire de bord à raz les cailloux. J'entame le bord qui va me mener vers un débridé de folie dans le chenal de sortie de la baie. Un front polaire pousse un amas météo que je vais essayer de devancer au maximum. La température a chuté à moins 6 degrés, le vent a forci à 45 noeuds (un peu plus de 80 km/h). La marée est descendante. La sortie est musclée.

Les cargos se suivent à un rythme impressionant. Je leur laisse toute la place. Comme à chaque départ en solitaire, je vis dans un état second. Je suis à la fois dans l'apréhension la plus totale, presque une terreur que mon esprit impose en mesurant pleinement la démesure, l'absurdité de ce que j'entreprends, sur un bateau trop petit, mal équipé, pas en état... moi qui ai tant répété que la mer, quand tu lui ouvres une porte, elle s'y engouffre. Cette loi de Murphy qui hante, pourchasse et rattrape invariablement le marin imprudent! Tu laisses la possibilité à un problème de survenir, il il invite tous ses copains, même les moins recommandables! Et je suis en même temps dans un état d'exaltation presque hystérique tant j'aime sentir le bateau surfer, vibrer de toute sa carcasse et donner à mon imagination le loisir de penser que le plaisir surpassera tout, une fois de plus. Je me répète comme un leitmotiv que je préfère de toutes façons mourir en mer plutôt que dans un accident de voiture. Mais je n'arrive pas à m'empêcher de frissoner à l'idée de mourir noyé. Le paradoxe insupportable!

Je passe les premières 70 heures sans dormir, accroché à la barre, cherchant à tirer tout ce qui peut l'être de cette météo à la fois difficile à cause des vents trop puissants et trop froids, et à la fois favorable car je ne pouvais espérer mieux que les voir souffler dans mon dos dès le départ! En même temps, je commence à prendre l'exacte mesure de ce qui m'attend en terme de navigation. Il m'est pour l'instant impossible de dormir. Le traffic maritime est trop intense, la mer trop forte, la côte encore trop proche. Et je commence à me rendre compte que la gestion du sommeil sera beaucoup plus dure que ce que j'imaginais.

15/03/2013

Il y a les vivants...

il y a les morts, et il y a ceux qui partent en mer. Cette citation d'Anacharsis que mon frère m'envoyait il y a peu (l'attribuant à tort à Aristote), était la manifestation de son inquiétude de me perdre. Plus inquiet encore que ma mère, peut-être parce que plus "breton" qu'elle!

Le seul moyen à ma portée pour me rendre en Virginie est le bus. Ce sera long. Il faut que je fasse une étape à New-York, pour tenter de trouver au moins une partie des choses dont j'ai besoin pour remettre le bateau en état de naviguer. Je ne peux m'offrir une nuit en ville. Je décide de tenter le couchsurfing. Une fille me répond et m'offre une nuit chez elle. Je ne peux m'empêcher d'être un peu inquiet. Va-t-elle changer d'avis au dernier moment? Et si c'était un psychopathe? D'autant que sur sa fiche, son métier affiché est "forensic psychologist"; psychologue médico-légal. Pas courant, quand même!

Tempête de neige sur Montréal, je rate mon bus, l'averti que je serai en retard. L'inquiétude grandi. Je n'ai pas les moyens d'être pris à New-York dans la rue, avec mes bagages et tout ce que je dois y faire. Et je n'ai pas d'alternative... la méga-galère.

J'arrive à Port Authority, vais dans un cyber-café, car elle n'a pas répondu à mes derniers mails. Je n'ai ni son adresse, ni son téléphone. Ouf, un message avec son numéro de cellulaire (téléphone portable). Je lui envois un texto. Elle me répond, me donne les indications pour me rendre à la station de métro la plus proche de chez elle. Je suis sur mes gardes. C'est au coeur du Queens, que je ne connais pas, et la nuit est tombée.

Je sors de la station, suis ses indications. Je la vois, seule, les mains dans les poches, le cou rentré dans son manteau. Début trentaine, elle est vraiment très, très belle. Ce qui m'inquiète un peu plus encore. Serait-ce un coup monté? Ça pourrait être un traquenard avec des ficelles grosses comme ça! Je l'interpelle. Elle sourit. Les photos de moi lui avaient fait penser que j'étais plus grand... beaucoup plus grand que je ne suis. Elle attendait un géant de 1m95.

On commence à discuter en marchant en direction de chez elle. Elle a l'air "clean". Tout colle dans ses propos. Je gagne en confiance. Mais je suis un peu surpris de ne ressentir aucun doute, aucune inquiétude d'elle à mon sujet. Cela me surprend d'autant plus dans une ville comme New-York.

Arrivé chez elle, elle m'offre la petite chambre d'amis, et me demande ce que je veux faire. Je la laisse me guider. J'ai un petit budget bouffe, elle me propose d'aller au restaurant. Arrivé au métro, la machine à tickets refuse mon billet de 20$. Je lui demande si elle a de la monnaie. Elle me DONNE 10$ et refuse que je la rembourse. Je suis estomaqué!

Aussi touché que quand une de mes lectrices ici, ayant appris la perte de mon lecteur MP3, m'a envoyé de l'argent pour que je puisse m'en racheter un. Merci encore... infiniment!

Nous arrivons dans un petit restau latino, abordable, très sympa. On commande. Je crois que je choisis mieux qu'elle. Mes plats arrivent avant les siens. Je partage avec elle. Elle semble un peu déçue de ses plats quand ils arrivent, longtemps après les miens. Je partage à nouveau les miens, qu'elle semble vraiment apprécier. On discute comme de vieux amis qui ne se sont pas vu depuis longtemps, de pleins de choses, de nos enfances, de nos passions. Elle adore "sa" ville (d'adoption... elle vient en fait de l'Alabama), elle adore son quartier, le Queens, qu'elle n'échangerait pour rien au monde. Je resterai deux jours chez elle. Elle fera tout pour rendre mon séjour agréable. Elle écrira en commentaire sur le site de couchsurfing à quel point j'ai été un invité agréable, respectueux, reconnaissant, fascinant par mon vécu et la façon dont je le partage. "Absolutly lovely" dira-t-elle même en recommandant chaudement aux gens de ne pas hésiter à m'héberger. Je suis touché, vraiment. Presque désarçonné tant mon estime de moi est retombée au plus bas depuis mon retour dans la rue.

Mer,monde,bonheur

Anacharsis était impressionné par ces quelques centimètres de bordé qui séparaient le marin de la mer, de la mort. Allongé sur ma couchette, dans le carré, la tête contre la coque, je sens cette vulnérabilité.

Je suis sur le bateau depuis 10 jours. Il y aurait beaucoup de travaux à faire pour le rendre conforme à mes normes habituelles. Quand je suis arrivé en Virginie, il faisait 18 degrés et grand soleil. Je me suis mis en t-shirt. Depuis, il pleut. Et ce soir, je suis rentré sous la tempête de neige. Il fait zéro dans le bateau. Je n'ai pu faire presque aucun des travaux prévus. Il faut que je parte pourtant, sans attendre. Je ne peux pas reculer.

Au bord de sombrer dans le sommeil, je sursaute tout à coup, me reveillant en réalisant à quel point ce que je fais est excessif, en prenant la pleine mesure du danger. Je vais être sur une coquille fragile sur une des mers les plus dangereuses, d'après "ceux de la marchande" (expression signifiant les marins de la marine marchande). Je vais être seul, devant veiller et barrer 24h sur 24 (je n'ai ni pilote automatique, ni régulateur d'allure) avec des pauses de repos par tranche de 15 minutes maximum, à cause de la circulation intense des cargos dans le secteur, surtout en sortie de la baie de Cheseapeake et au sud des Carolines. 15 minutes, c'est le temps que peut mettre un cargo invisible à l'horizon pour te fracasser et te couler. Cela semble improbable, mais il y a beaucoup d'accidents de ce genre. J'ai déjà gouté à la météo de ce secteur, à ses tempêtes dures comme le silex, et je me vois tout à coup heurté par un cargo, écrasé par une déferlante, en train de couler sans possibilité de secours, car je n'ai ni radeau de survie, ni équipement adéquat. Et je me mets à penser que ce cauchemar est peut-être prémonitoire!

24/12/2012

En attendant, je me shoot...

Ne bois, ni ne me drogue... pas une bière, un verre de vin, pas même une cigarette... Je ne fume plus depuis des siècles!

Je garde toutes mes ressources pour préparer ce voyage au mieux. Je me rattraperai avec le rhum de la Martinique. J'ai décidé que j'y ferai une halte de quelques jours, jouerai les marins en asséchant quelques caves, en calant quelques fûts.

Puis je cuverai en me laissant bercer par la mère des Caraïbes et de tous les autres... la mère mer!

Alors oui, je me shoot à l'internet, fouillant frénétiquement à la recherche de mes morceaux. Je retrouve Manfred. Je retrouve Guy. Je recolle les morceaux d'histoires qui me manquaient.

Je visionne des documents, des vidéos de mer. Pour me galvaniser, pour me rappeler, pour retrouver ce qui me manque depuis si longtemps. Ces morceaux de moi qu'on a éparpillé, épars, pillés!

Par la force des choses, je prends mon temps. Tempêtes ont eu raison de la planification du voyage des papiers du bateau. Voie des airs, voie des mers, même combat.

Alors je fouille, trouve des aubaines. J'ai fait des listes.

La première, c'était ce dont j'avais besoin pour partir. La deuxième, ce qu'il faudrait au moins que j'emporte pour naviguer raisonnablement. La troisième, ce que j'aimerais au moins pouvoir acheter. La quatrième, ce que je pourrai peut-être parvenir à acquérir. La cinquième, ce que j'envisage d'acheter finalement, avec un peu de chance. Tant pis, je me gèlerai quelques jours, prendrai quelques risques supplémentaires. Bah, ce sera la mer... les amers à terre amènent l'amer de la mer, avant même de la prendre.